Création artistique de Franck PASQUALINI pour le poème L'envol, extrait du recueil Solitude étrangère ©.
Yves Philippe de Francqueville
pirate des mots et philanalyste en herbe,
présente le quatrième et dernier tome du Cycle de l'Austrel : la Mort de l'Archyeur.
Huitième partie.
Tous droits réservés ©.
Yves Philippe de Francqueville
pirate des mots et philanalyste en herbe,
présente le quatrième et dernier tome du Cycle de l'Austrel : la Mort de l'Archyeur.
Huitième partie.
Tous droits réservés ©.
Pol :
— J'ai vécu encore une riche rencontre avec Yeph.
C'était formidable de pouvoir échanger d'égal à égal. Lorsque nous dialoguons, il sait autant recevoir que donner.
Jamais cela ne m'a semblé possible au CEI.
Chris :
— Ah, cher Pol, pour nous les greffés, nous vivions davantage un enfer puisque nous avions en sus l'impossibilité totale de réfléchir sur le fondé des connaissances reçues. L'instruction était parfaite, imposée par des maîtres parfaits.
Nous avions jour après jour des certitudes imprimées dans notre cerveau.
S'en libérer maintenant n'est pas une sinécure !
Emma :
— C'est vrai, Chris.
Les primaires avaient encore la chance de pouvoir se remettre en question à l'écoute des professeurs, même si cela n'était pas simple. Oui, réfléchir par soi-même — seul — après des leçons reçues par ceux qui savent !
Pol :
— C'est le mot : ils savent.
Nos instructeurs savants du CEI ont la science, le savoir… de l'instant.
Tant de vérités relatives [i] !
Chris :
— Si facile de nous persuader, lorsque la contradiction n'est pas autorisée !
Nous avons été construits avec la conviction qu'une autre manière de penser était inconcevable[ii].
Pol :
— Et sans Yeph, je serais toujours la bouche ouverte, à gober des vérités sur leurs versions de l'histoire… des dieux et des sciences !
Emma :
— Un regard formaté de ce qui est bien, de ce qui fut et de ce qui sera… le tout selon une étude manichéenne, académique et terriblement binaire, voire monolithique !
Chris :
— Pour les greffés, c'était encore plus étouffant… la construction de notre esprit se réalisait unilatéralement dans une forme totalement homogène. Le principe de la greffe seconde était de n'offrir qu'une seule route à notre pensée…
Pol :
— Imposée par le Centre !
Chris :
— Absolument…
Votre instruction orientée sur la notion dualiste m'a semblé alors un progrès sensible, et même ce fut bouleversant lorsque j'ai compris avec Tomas les notions que notre cerveau ne pouvait assimiler par la greffe seconde.
Emma :
— Et pour nous, les Primaires, ce fut une libération certaine, à savourer la rencontre extraordinaire avec la pluripossibilité !
Toute une problématique étriquée autour du bien et du mal ; deux notions limitées et castratrices dans lesquelles nous étions confinés, se sont effondrées avec la rencontre de Yeph.
Pol :
— Quel bonheur !
Au-delà de notre mémoire disparue, il a su notamment par le cœur, nous permettre de le retrouver et de découvrir ce qu'il a lui-même appris.
Emma :
— Le Plark du Mont-Rouge fut une très bonne école où il a pu recevoir, découvrir et nous transmettre des savoirs sans que nous soyons dans l'obligation de nous y rendre.
Chris :
— C'est d’ailleurs quasi impossible maintenant pour des individus hors normalités comme nous, d'y pénétrer…
Pol :
— Et oui… ils se méfient davantage.
La paix relative dans un Plark impose des lois précises autour d'une morale qui se trouve mise en défaut par le jeu des questions. Nous sommes dangereux pour ces maîtres incapables du "peut-être".
Chris :
— J'ai une admiration certaine pour Yeph. Il a osé affronter cet espace et se remettre en cause.
Il a accueilli le fait qu'il ne savait rien[iii]… puisque la connaissance est relative !
Emma :
— Tout comme le temps, l'espace, la vie… la mort.
Chris :
— Oui.
Nous ne sommes pas en mesure de comprendre notre propre existence, alors que faire…
Moi je ne veux plus me limiter à des certitudes monolithiques ou à quelques questionnements binaires…
Emma :
— La pluripossibilité nous fragilise cependant…
Pol :
— Et pourrait nous rendre fous !
Franch se complaît bien dans cette jouissance de l'absurde.
Chris :
— C'est sa liberté…
Puisque nous n'avons pas réellement conscience de notre vie sociale, la mort reste aussi une illusion temporelle.
Emma :
— Et la maladie alors ?
Pol :
— Que penser de Tomas, qui se voyait chaque jour plus faible dans sa possibilité de communiquer… d'aimer ?
Emma :
— Aurait-il pu inverser le processus ?
Pol :
— J'ai lu dans un ouvrage retrouvé par Franch, que des jumelles — en des temps anciens — vers leur cent deuxième année, avaient vu — senti est plus judicieux — pousser dans leur mâchoire une dentition nouvelle[iv]…
Chris :
— Vraiment ?
Pourtant…
Emma :
— Voilà cher Chris une réaction qui nous éclaire sur ta situation où tout est encore bien ancré dans ta petite tête. Tu as tant et tant de certitudes et de vérités imposées à laver de ton esprit, de ton cœur, et bien entendu de ton corps !
Tu as beaucoup à désapprendre…
La science est d'un instant.
Nous savons… puis certains doutent et questionnent, cherchent, pour qu'enfin d'autres trouvent !
Pol :
— L'un doute à nouveau…
Chris :
— Et l'on cherche une fois de plus !
J'ai bien compris cela. Cependant pour le corps humain, il y a des découvertes médicales qui sont définitivement acquises.
Emma :
— Non Chris.
La nature évolue.
Plantes et animaux, depuis des milliards d'années se sont façonnés pour prendre leur place dans un espace et poursuivent une quête que nous ne comprenons pas vraiment.
L'homme, au milieu de cet univers…
Pol :
— Ah, Emma… Tu ne serais pas encore quelque peu nombriliste ?
Ô femme sacrée ?
Emma :
— Merci Pol pour ta remarque habile…
Je suis très flattée…
Chris :
— Je ne comprends pas ?
Pol :
— L'homme au centre du monde !
Ah, ah, ah !
Emma :
— Oui, j'ai encore moult croyances imposées à libérer de mon cerveau… et je reste terriblement égocentrée !
Pol a raison cher Chris : nous ne savons en effet rien sur la place à donner à l'humain dans les jeux d'infinis : entre le micro et le macro, nous avons été façonnés dans l'idée que nous régnons sur tout… alors que nous sommes moins que moins que poussière au regard de l'univers et de la temporalité.
Cependant, il est bon — constructif plutôt — de se poser parfois dans une vision raisonnée de notre monde, afin de nous questionner ensemble sur notre existence !
Chris :
— Ce que Yeph aime appeler "une île"… "La possibilité d'une île"…
Pol :
— "Enfin une île, et repartir" !
C'est cette zone autonome si chère à Franch…
Chris :
— Que Tomas revendiquait si souvent…
Emma :
— C'est un espace de liberté temporaire, basé sur le questionnement… à la recherche du sens de la vie :
Qui sommes-nous ?
D'où venons-nous ?
Où allons-nous ?
Pol :
— Et pourquoi ?
Oui…
Comme Emma, je m'interroge sur notre évolution physique. Tomas avait abandonné peut-être un peu vite tout espoir de guérir…
Emma :
— Non.
Il a été finalement d'accord pour partir au sanatorium de la Base de l'Égrêt.
Pol :
— Tu le penses vraiment ?
Il savait que l'Offryde allait échouer.
Chris :
— Pas sûr !
Nous ne pouvions pas prédire à ce point l'avenir.
Il restait encore quelques possibles.
Emma :
— En effet.
J'étais avec eux ce soir là quand il s'est décidé…
Pol :
— Franch m'a assuré…
Chris :
— Ah, mon ami !
Tu te limites encore à écouter ceux qui parlent avec le cœur uniquement…
Franch a dit vrai selon son ressenti affectif… et pourtant il était présent lorsque Tomas se disputait avec Yeph et moi… et aussi, je pense, quand il a donné son accord à Sako.
Emma :
— Oui.
Dans sa démarche, Tomas a laissé la place — si faible, si infime soit-elle — à la contingence d'une réussite de l'Offryde et…
Pol :
— Et aussi à la possibilité de guérir ?
Je suis bouleversé…
Cela me fascine !
Donc il espérait encore ?
Chris :
— Chez Tomas, le plus difficile était dans le fait que la suppression de la greffe avait touché aussi l'affect, au-delà du corps et de l'esprit !
Tomas était épuisé…
Son raisonnement se voyait donc totalement perturbé dans l'harmonie ternaire.
Cependant l'amour de Yeph, de Franch et de nous tous aussi, l'a finalement éveillé vers un autre regard, sur sa situation de dégénérescence cérébrale.
La mort de Tomas n'était pas écrite dans son choix du voyage en vaisseau d'Extalyne.
Emma :
— Il y avait une situation de pluripossibilités.
Pol :
— Il aurait donc pu guérir…
Emma :
— Je n'aime vraiment pas ce mot.
Guérir de quoi ?
Nous ne guérissons de rien.
Quel docteur — le plus habile des médecins — saurait nous sortir de cette route de la vie qui conduit à la mort ?
C'est d'une recherche d'harmonie qu'il est plus sage de parler lorsqu'il y a blessure.
Penser guérir, c'est se rassurer d’une intégrité retrouvée pour une perfection qui n'existe pas. C'est un leurre, car notre être est en constante évolution. Mon métabolisme n'était pas le même à quinze ans, comme il se présente aujourd'hui… et demain il sera autre.
L'important, serait de réussir à vivre pleinement l'instant.
Si une défaillance physique, affective ou psychologique se révèle, nous pouvons alors espérer une restauration… et que la vie se poursuive dans la quête d'une nouvelle harmonie.
Pol :
— Merci Emma, tu as fort bien exprimé une proposition de réponse à ma question !
Chris :
— C'est intéressant en effet !
Un tableau de maître qui est abîmé peut être restauré… Garde-t-il son originalité ?
Yeph aime à dire que le temps transforme tout[v].
Pour la peinture, les encres et les pigments se modifient avec les années, voire les siècles et même les millénaires… pour de très multiples raisons.
Les "connaisseurs" — encore des experts qui sont porteurs de vérités — s'efforcent alors parfois à vouloir "redonner" à une œuvre sa réalité d'origine… sans comprendre qu'il n'y en a pas. Le temps donne à l'art des reflets toujours différents. La restauration d'une œuvre implique la naissance d'une œuvre nouvelle ou hélas, un massacre organisé avec la bienveillance de conseillers trop sûrs d'eux !
Même pour la musique, nous ne savons rien des créations du passé !
Une romance, une symphonie, un chant d'hier n'a pas aujourd'hui la même sonorité à nos oreilles. Les instruments évoluent, nous ne savons pas toujours lire les partitions à la manière de l'artiste et surtout aussi, notre capacité auditive progresse et métamorphose en nous bien des sensations.
Pol :
— Peut-être, mais une mélodie reste une mélodie… pour tous !
Chris :
— Pas exactement.
Avec un tempo différent, d'autres voix ou des instruments nouveaux, nos oreilles entendront une œuvre toute autre que celle posée par l'artiste !
Seule l'idée de ma musique est la musique la plus réelle.
Comme l'on dort dans un lit sur trois et pas dans le plus vrai, comme l'objet qui n'est pas l'idée de l'objet… la musique nous échappe, lorsque nous tentons de la figer !
Il y a le lit que j’ai en projet, dans mon esprit… il y a le lit réalisé en matière… et enfin le lit dont je vais vous parler ! Le « vrai » lit est bien celui qui n’existe pas… car la réalisation physique est le plus souvent la pâle copie de notre imagination… mise en exergue par la description mêlant la réalité et la fiction lorsque je raconte « le lit ».
J'ai ainsi revisité pour la musique, le Mythe de la Caverne de Platon :
"Les réalités intelligibles" se pervertissent à chaque étape de la concrétisation et faussent la communication.
L'unique observateur qu'est l'artiste créateur — avec la composition en tête, prêt au jaillissement — voit son œuvre se corrompre en l'offrant au monde. La dysharmonie s'accroît lorsque nous passons dans "les choses sensibles". Ce que nous croyons "vrai" dans l'écoute du son est une illusion similaire à l'ombre projetée sur le mur de la Caverne !
[i] Merci à Anatole FRANCE ses dernières confidences avec Nicolas SÉGUR dans son livre des « Dernières conversations avec Anatole FRANCE »… dont en voici de nouveau le bel extrait :
« D’abord mon ami, je crois que s’il s’agissait de la Vérité absolue, nous pourrions en dire ce que ce diable de VOLTAIRE faisait dire à SPINOZA, s’adressant à Dieu :
“Je crois, entre nous, que vous n’existez pas.”
« Mais les vérités dont nous parlons sont des vérités tout à fait relatives, einsteiniennes, précisément. Le temps, le lieu, tout peut les changer. Résultat des connaissances humaines, elles subissent nos métamorphoses. Dans le domaine scientifique et historique, une vérité, cela veut dire une explication que, pour le moment, rien ne peut contredire. Lorsque notre explication d’un fait reçoit le consentement de tous parce qu’elle paraît concorder avec l’ensemble des notions connues, nous l’appelons vraie.
« Alors, nous remplaçons ou nous rapiéçons sans cesse nos vérités. On dit que le corps humain se renouvelle tous les sept ans. Le plus grand nombre des vérités humaines se renouvellent tous les siècles à peu près, excepté quelques-unes, très rares, qui peuvent durer un millénaire.
(…)
— Alors, il n’y a pas de Vérité absolue ?
— Non, mais il y a des vérités qui vivent et meurent comme nous. Définissons la vérité, si vous voulez, en disant qu'elle est la conclusion de tout ce que nous connaissons aujourd'hui : le résultat algébrique de nos notions sur le monde au moment où nous sommes. Lorsque d'autres observations, d'autres faits, d'autres idées viendront s'y joindre, notre addition ne sera plus exacte, notre vérité ne sera plus la Vérité.
— Mais alors, la Vérité ?
— Alors, alors, mon ami, la Vérité se passe dans notre petit cerveau. Ne la projetez pas hors de son misérable milieu. Elle en serait effrayée. (...) ».
[ii] Merci à tous ceux qui ont tenté de réformer les académies… de PLATON à François RABELAIS… bien entendu sans oublier Friedrich NIETZSCHE !
[iii] Merci encore à PLATON et à son magister SOCRATE.
[iv] Merci à cette "exception" qui fut révélée au monde incrédule… Cela s'est réalisé au sein des petites îles japonaises du grand nord, à une époque où les méfaits de l'atome n'avaient pas encore pollué à outrance cet espace de la planète. Ces jumelles de 102 ans sont-elles le symbole d'un humain en évolution ou un mensonge de la nature… ou est-ce encore une mystification ? La réflexion s'ouvre à tous ceux qui espèrent en l’évolution !
[v] Merci à l'étude d'ANAXAGORE reprise par Antoine Laurent de LAVOISIER… celui que les juges politiques de la Révolution française ont condamné à l'échafaud… sous prétexte que "la République n'a pas besoin de savants"… Alors que penser du « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » ?
Et le rien, c’est quoi ?
Aussi, comme Socrate nous a expliqué que l'âme n'était pas une harmonie — une harmonie étant "un accord parfait", ce qui ne semble pas être exact chez l'être humain — ("l'âme est une chose beaucoup trop divine pour être une harmonie"[vi]).
L’âme seule est comme inachevée. C’est la souffrance des anges :
« Doit-on se réjouir que notre âme ait un corps
Si nous fûmes créés avec des interdits…
Alors que dans les cieux, des anges, des esprits,
Se sentent limités et souhaitent notre vie ? »
Nous pourrions nous interroger sur ce fait : si la vie était finalement une leçon de musique ? Son aspiration première serait alors de rechercher une harmonie entre le corps, le cœur et l'âme.
Oui, l’être évolue, se développe, s’harmonise, toujours plus libre pour rejoindre l'idée de beau, de bien.
L'harmonie y serait parfaite, puisque unie à « l'Âme du Tout ». Aussi je laisse parler Platon en utilisant musicalement "la Ligne explicitant l'Apologie de la Caverne"[vii].
Voici ce que nous pouvons composer par un dessin :
Oui, l’être évolue, se développe, s’harmonise, toujours plus libre pour rejoindre l'idée de beau, de bien.
L'harmonie y serait parfaite, puisque unie à « l'Âme du Tout ». Aussi je laisse parler Platon en utilisant musicalement "la Ligne explicitant l'Apologie de la Caverne"[vii].
Voici ce que nous pouvons composer par un dessin :
Emma :
— Formidable démonstration[i]…
Pol :
— Bravo pour ton analyse subtile.
Encore davantage de connaissances à assimiler pour mieux comprendre l'humain !
Emma :
— Absolument, puisque même après un rhume, nous sommes différents. Le corps libéré de cette maladie semblant banale, a modifié sa composition cellulaire.
En un cycle, nous sommes une autre femme, un autre homme[ii]…
La guérison est une illusion spatio-temporelle de plus !
Pol :
— Très fort les amis… j'ai ouvert de nouveaux espaces de questionnements dans ma pluripossibilité !
Mon état d'individu hors normalités est toujours comblé dès que j'aperçois une porte inconnue qui s'offre à mon esprit… cela charme mon cœur et met en branle tout mon être !
Le jaillissement s'annonce…
Chris :
— Ça y est…
Pol va encore exploser !
Emma :
— Mon cher Pol, nous sommes attentifs à tous les possibles avec toi, ah, ah !
Pol :
— Oui…
C'est pour toi, Chris, que je me questionne !
Emma :
— Je pense saisir où tu souhaites nous orienter…
Chris :
— Je ne vois pas…
Pol :
— Ah, mon cher Chris… et pourquoi ne vois-tu pas ?
Emma :
— Eh, oui… Chris ?
Tu ne vois pas !
Chris :
— Oh, vous faites de l'esprit !
Oui, en effet… je ne vois pas au sens figuré, comme au sens propre…
Pol :
— En fait, tu ne vois plus.
La différence est de taille.
Chris :
— Vous avez des idées un peu étranges !
Ma situation n'est pas très complexe à expliquer : la greffe seconde était trop proche de l'espace sensoriel de la vision. Le chirurgien a fait certainement de son mieux… il a dû hélas ôter un peu plus que la greffe lors de l'opération !
Quand un pied est amputé, il existe des prothèses de qualité. Pour la vision c'est différent. Il est plus facile de marcher avec une jambe de bois que de voir avec un œil de verre !
Je sais que les progrès de la médecine sont chaque jour extraordinaires, cependant l'espace de la vision n'est plus actif dans mon cerveau. Mes yeux sont morts, et toute la machinerie… s’est sclérosée.
La greffe de cerveau n'est pas encore d'actualité dans la Cité, même si cela serait fort utile pour les membre de l'Austrel !
Et surtout pour l'Archyeur…
Car ce sont des monstres qui engendrent des monstres !
Pol :
— Écoute, mon ami : "Même une branche coupée repousse. Même la lune disparue croît de nouveau. Le sage qui considère ceci ne tombe pas dans l'adversité"[iii].
Chris :
— Oh, je suis assez en paix avec moi-même…
Emma :
— En paix… et quelque peu résigné !
Chris :
— Pas tant que cela : heureux de la musique à vivre avec ceux que j'aime…
Pol :
— Pourtant, en manque de la dimension spatiale…
Chris :
— C'est vrai, cependant…
Emma :
— Cependant… je suis convaincu du merveilleux de notre corps.
Pol révèle en moi cette idée que chez les plantes et les animaux — présentés à nous dans l'instruction du CEI, comme inférieurs à l'humain — tout est possible.
Pol :
— Le lézard retrouve une queue, différente mais bien réelle en regard de celle brisée.
Le lapin, comme la plupart des rongeurs, voit ses dents et ses griffes pousser toute la vie… comme nous, semble-t-il, pour les ongles.
Les cheveux, les poils croissent, l'épiderme se restaure très vite…
Dans leur matrice — lorsque les femmes avaient le droit de porter un enfant — c'était une usine merveilleuse où de deux demi cellules fusionnant, une alchimie formidable construisait naturellement des cellules démultipliées, qui, s'associant, donnaient les êtres que nous sommes.
Emma :
— Je suis entièrement d'accord avec toi, Pol.
Tu nous éveilles davantage à la pluripossibilité.
Oui, Chris… pourquoi pas ?
Saurais-tu inviter ton corps à créer nouvellement un espace de vision ?
Si une branche coupée repousse… un bras, une jambe, sauraient certainement aussi se restaurer, si nous avions davantage foi en notre puissance génératrice !
Ah, si nous avions la sagesse d'une confiance recouvrée en notre corps, nous saurions reconnaître ses facultés extraordinaires…
Écoutons-le, aimons-le, plutôt que de le frustrer toujours plus et de le mépriser par toutes ces croyances, cette morale et les interdits dont nous sommes pétris !
Un livre dessiné — dans mon souvenir lointain — parlait en effet de cela… Une femme à la main coupée voyait son membre naître de nouveau… aidée cette fois d'une "Mantrisse", être non humanoïde très évolué, qui se plaisait à éduquer quelques humains hors normalités, à accueillir et à développer leurs capacités et éveiller ainsi leurs talents.
Cela se passait dans une autre constellation… mais c'était bien des humains comme nous, en devenir[iv] !
Pol :
— Je n'ai pas encore lu cet ouvrage. Il répond parfaitement à ma question !
Chris :
— Oh, les amis… vous êtes redoutables, tous les deux !
J'aurais donc en moi les essences nécessaires et suffisantes pour recouvrer la vue ?
Oui… bien entendu !
Peut-être pas comme à l'origine, cependant le possible existe.
Il me faudrait alors beaucoup de volonté, d’audace… et savoir aussi demander l'aide nécessaire !
Pol :
— Souhaiter une restauration de maître pour un individu hors normalités qui le mérite ?
Je suis prêt à t'aider, avec plaisir !
Emma :
— La force vive de Tomas — dans son rayonnement — nous porte à te donner tout ce que nous pouvons en énergie… en amour !
Pol :
— Tu sauras évoluer en confiance : tu as notre soutien, cher Chris.
Chris :
— Merci.
J'ai l’énergie nécessaire.
Cela se réalisera en son temps.
Pol :
— Pour notre plus grand bonheur !
Emma :
— C'est à voir, maintenant…
[i] Merci à la conclusion récupérée dans le mémoire de Maîtrise en Philosophie, réalisé par Yves Philippe de FRANCQUEVILLE…
[ii] Merci à ARISTOTE, pour son ouvrage « Les Animaux », un des rares textes pas trop triché par les copistes — semble-t-il — mais dont les sources furent fortement puisées par l’auteur chez HIPPOCRATE… qu’il faudrait donc remercier, bien que je n’aie pas eu encore la chance de le lire, et merci à Anatole FRANCE qui l’a revisité.
[iii] Sagesse de BHARTRIHARI révélée par la porte des toilettes de mon enfance où mon cher père aimait nous édifier en liberté… en collant un grand nombre de maximes et sentences des temps anciens… pour nous aider à réfléchir !
[iv] Merci à LÉO, pour ses Cycles passionnants autour d'Aldébaran, de Bételgeuse et d'Antarès…
La Mantrisse est un être riche à la rencontre.
Yves Philippe de Francqueville pirate des mots et philanalyste en herbe, présente le quatrième et dernier tome du Cycle de l'Austrel : la Mort de l'Archyeur.
Huitième partie
Il serait désolant d'extraire une phrase de cette œuvre pour la calomnie… Que l'univers journalistique ne s'y abaisse pas, car l'auteur réfute bien entendu tout propos qui n'est pas pris dans son ensemble.
Tous droits réservés ©.
Désir de passer à la version papier ?
L'édition de mai 2016 est disponible :
Huitième partie
Il serait désolant d'extraire une phrase de cette œuvre pour la calomnie… Que l'univers journalistique ne s'y abaisse pas, car l'auteur réfute bien entendu tout propos qui n'est pas pris dans son ensemble.
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Désir de passer à la version papier ?
L'édition de mai 2016 est disponible :
Auteur : Yves Philippe de Francqueville