Création artistique de Franck PASQUALINI pour le poème L'envol, extrait du recueil Solitude étrangère ©.
Yves Philippe de Francqueville
pirate des mots et philanalyste en herbe,
présente le quatrième et dernier tome du Cycle de l'Austrel : la Mort de l'Archyeur.
Cinquième partie.
Tous droits réservés ©.
Yves Philippe de Francqueville
pirate des mots et philanalyste en herbe,
présente le quatrième et dernier tome du Cycle de l'Austrel : la Mort de l'Archyeur.
Cinquième partie.
Tous droits réservés ©.
Sako :
— Ô grand Archyeur, devant le Conseil de l'Austrel, je viens vous rendre compte de ma mission.
Érik :
— Nous t'écoutons, Sako.
Sako :
— Voilà, le vaisseau d'Extalyne est prêt à décoller pour le sanatorium de la Base de L'Égrêt.
À son bord, six cent trente-quatre passagers ayant un handicap, membres d'équipage inclus… dont Tomas, le gémellaire.
Frado :
— C'est parfait, Sako.
En tant que premier président du plus grand laboratoire pharmaceutique de la Cité — principal acteur financier dans la recherche sur le principe évolutif de la greffe — je puis être satisfait au nom de tous nos savants, ainsi que des actionnaires.
Sako :
— Cela fut difficile…
Érik :
— Nous avions confiance en tes compétences !
Frado :
— Et Yeph, sera-t-il du voyage ?
Sako :
— Vous ne m'aviez pas chargé de…
Érik :
— Pas de souci, Sako.
Ne t'inquiète pas.
Il est vrai que cela aurait été grandiose de savoir l'ensemble des primaires en route pour le sanatorium de la Base de L'Égrêt.
Les consortiums aspirent tant à une paix durable.
Ils espèrent toujours que les derniers individus hors normalités puissent être guéris, sans en mesurer la difficulté politique.
Ils sont avant tout des économistes !
Frado :
— Y a-t-il cependant dans cette longue liste de malades à soigner quelques noms de ces primaires que nous redoutons ?
Sako :
— Eh bien… J'ai surtout privilégié les porteurs de la greffe seconde… pour offrir les places aux nombreux volontaires.
Érik :
— Oui, je comprends… pas de souci !
Le but de ta mission était de persuader Tomas.
Nous saurons agir autrement pour les derniers primaires, le jour venu.
Merci Sako.
Tu peux disposer.
L'Austrel doit se réunir maintenant à huis clos.
Nous saurons être reconnaissants de ta réussite.
Sako : - Merci à vous.
Je n'ai réalisé que mon devoir de chef de la Concorde.
* * *
[En visuel sur un écran :
Dans le Vaisseau d'Extalyne.]
Jean :
— L’Offryde a échoué… Et ce n’est pas ma première tentative !
Léo :
— Je ne sais plus quoi proposer maintenant pour ouvrir une nouvelle porte de vie.
Les régulateurs de l’Austrel ont pris possession de nos coordonnées moléculaires.
Tomas :
— Allez, je pense qu’il faut nous préparer à mourir alors !
Pièr :
— Non !
Non…
Léo :
— Comment cela ?
Pièr :
— Il y a encore certainement une possibilité ?
Nous pourrions peut-être négocier directement avec le Haut Conseil ?
Jean :
— Impossible, Pièr.
Nous n’avons plus de carte vitale.
Depuis la Chalystime, seuls les êtres sains sont autorisés à vivre.
Pièr :
— Nous ne sommes pas contagieux.
Nos maladies sont dégénératives sans être virales.
C’est d’ailleurs en lien avec les greffes, d’après mon professeur.
Tomas :
— C’est incroyable…
Vous êtes décidément tous les mêmes : de beaux principes et lorsque vient votre heure, tous, vous ne pensez qu’à reculer de nouveau l’échéance…
Léo :
— Peut-être n’est-ce pas notre heure ?
Tomas :
— Écoutez !
Pièr :
— Tais-toi, Tomas… on dirait Yeph…
Jean :
— D’ailleurs, où est-il ?
Je n’arrive pas à entrer en contact avec la Base.
C’est par sa faute si nous sommes condamnés dans ce vaisseau d’Extalyne.
Normalement nous devions êtres envoyés vers un nouveau centre médicalisé, et nous voici bloqués dans une interface temporelle, sans moyen d’en sortir.
Léo :
— J’ai peur.
J’avais souhaité cette mission car il y avait un espoir de guérison.
Il y avait aussi du danger !
Jean :
— Tomas a raison.
Si le central nous rappelait maintenant, nous serions irrémédiablement kryfluxirés.
Nous allons mourir !
Pièr :
— Non !
Je ne veux pas finir ainsi. Il me restait bien quelques cycles à vivre avant ce voyage.
D’après mon professeur, ils ont trouvé au sanatorium de la Base des Cardes, un nouveau prototype de sérum afin de prolonger notre existence.
Tentons donc de modifier la destination…
Léo :
— Yeph ne peut désirer cela…
Si Tomas est avec nous, il tentera tout pour nous sauver.
Éva :
— Qui est Yeph ?
Tomas :
— Tu es bien la seule à ne pas le connaître !
Pièr :
— Nous l’avons écouté…
Et nous avons ôté nos greffes…
Éva :
— Moi, j’ai toujours la greffe…
Léo :
— Il nous a promis le bonheur, l'assurance d’être heureux…
Pièr :
— Et de vivre !
Tomas :
— Pas tout à fait ; il vous a davantage invités à saisir chaque instant de votre réalité… à construire, à gagner la liberté !
Jean :
— Et nous allons mourir…
Tomas :
— D’après les données de l’ordinateur central, c’est probable dans un futur très proche.
Léo :
— Pourquoi ??
Éva :
— Si Yeph a dit le contraire ?
— L’Offryde a échoué… Et ce n’est pas ma première tentative !
Léo :
— Je ne sais plus quoi proposer maintenant pour ouvrir une nouvelle porte de vie.
Les régulateurs de l’Austrel ont pris possession de nos coordonnées moléculaires.
Tomas :
— Allez, je pense qu’il faut nous préparer à mourir alors !
Pièr :
— Non !
Non…
Léo :
— Comment cela ?
Pièr :
— Il y a encore certainement une possibilité ?
Nous pourrions peut-être négocier directement avec le Haut Conseil ?
Jean :
— Impossible, Pièr.
Nous n’avons plus de carte vitale.
Depuis la Chalystime, seuls les êtres sains sont autorisés à vivre.
Pièr :
— Nous ne sommes pas contagieux.
Nos maladies sont dégénératives sans être virales.
C’est d’ailleurs en lien avec les greffes, d’après mon professeur.
Tomas :
— C’est incroyable…
Vous êtes décidément tous les mêmes : de beaux principes et lorsque vient votre heure, tous, vous ne pensez qu’à reculer de nouveau l’échéance…
Léo :
— Peut-être n’est-ce pas notre heure ?
Tomas :
— Écoutez !
Pièr :
— Tais-toi, Tomas… on dirait Yeph…
Jean :
— D’ailleurs, où est-il ?
Je n’arrive pas à entrer en contact avec la Base.
C’est par sa faute si nous sommes condamnés dans ce vaisseau d’Extalyne.
Normalement nous devions êtres envoyés vers un nouveau centre médicalisé, et nous voici bloqués dans une interface temporelle, sans moyen d’en sortir.
Léo :
— J’ai peur.
J’avais souhaité cette mission car il y avait un espoir de guérison.
Il y avait aussi du danger !
Jean :
— Tomas a raison.
Si le central nous rappelait maintenant, nous serions irrémédiablement kryfluxirés.
Nous allons mourir !
Pièr :
— Non !
Je ne veux pas finir ainsi. Il me restait bien quelques cycles à vivre avant ce voyage.
D’après mon professeur, ils ont trouvé au sanatorium de la Base des Cardes, un nouveau prototype de sérum afin de prolonger notre existence.
Tentons donc de modifier la destination…
Léo :
— Yeph ne peut désirer cela…
Si Tomas est avec nous, il tentera tout pour nous sauver.
Éva :
— Qui est Yeph ?
Tomas :
— Tu es bien la seule à ne pas le connaître !
Pièr :
— Nous l’avons écouté…
Et nous avons ôté nos greffes…
Éva :
— Moi, j’ai toujours la greffe…
Léo :
— Il nous a promis le bonheur, l'assurance d’être heureux…
Pièr :
— Et de vivre !
Tomas :
— Pas tout à fait ; il vous a davantage invités à saisir chaque instant de votre réalité… à construire, à gagner la liberté !
Jean :
— Et nous allons mourir…
Tomas :
— D’après les données de l’ordinateur central, c’est probable dans un futur très proche.
Léo :
— Pourquoi ??
Éva :
— Si Yeph a dit le contraire ?
[Dans la salle… devant l'écran.]
Gil :
— On ne peut pas les laisser ainsi dans ce vaisseau.
Ils vont devenir fous. Nous devons les sauver.
Je tente un rappel d’urgence.
Procédure de contact ?
Yeph :
— Non, laisse-les.
Gil :
— Ils vont tous être kryfluxirés…
Yeph :
— Je sais.
Gil :
— Pourquoi…
Sako :
— Nous pouvons essayer quelque chose, tout de même !
Yeph :
— Écoute, Sako, c’est inutile de jouer maintenant le candide. Pas de zèle entre nous : tu as bien vu les paramètres.
Leurs coordonnées de vie sont déjà déprogrammées. Si tu les extrais du vaisseau, leurs molécules tiendront dix minutes à peine.
Laisse-les mourir entre eux.
Ils ont ainsi une idée de leur mort et des projets pour l’instant présent…
Sako :
— Comment cela ?
Yeph :
— Oui, le temps du compte à rebours leur permet de donner encore un sens à leur vie.
Pour certains, par exemple, c’est l’occasion de me maudire après m’avoir adoré.
La colère réveille à l’extrême leurs sens et tu peux saisir de nouveau, dans leurs traits, des êtres vivants par la passion.
Libérés de l’Extalyne, tu verrais des larves se décomposer en quelques minutes.
Ils sont davantage humains ainsi.
Gil :
— Tu penses donc que nous devons assister — impuissants — à leur mort ?
C'est horrible.
Cette mission avait pour but de les diriger vers le sanatorium de la Base d'Égrêt.
Ils avaient tous misé énormément sur l’aboutissement de ce projet.
Yeph :
— Nul ne te force à regarder…
Rappelle-toi aussi que je ne suis pas maître de la réussite ou non de ce voyage.
Sako :
— Alors tu ne peux pas leur assurer la vie ?
Il y a certainement une solution que tu n’as pas encore proposée ?
Yeph :
— Suis-je un dieu pour que l’on pense qu’en ma présence, le risque zéro puisse exister ?
Sako :
— Je suis totalement abasourdi par ton indifférence, surtout à l’égard de Tomas.
Tu le laisses mourir avec les autres, sans émotion…
Essayons un transfert pour la Base des Cardes ?
Yeph :
— C'est un mythe… une invention de la Guilde pour se débarrasser des gêneurs. Un voyage sans retour !
Elle n'a jamais existé.
Gil :
— Mensonge facile pour te dédouaner.
Là, je suis moi aussi choqué !
Ces êtres fragiles ne sont pas capables de saisir ton attitude d’abandon.
Ils te faisaient confiance…
Yeph :
— Oui, je sais.
Moi aussi j’étais dans la confiance.
Ce vaisseau d'Extalyne a été affrété par la Guilde, avec la bénédiction de l'Archyeur.
Allaient-ils guérir ? Nous l’espérions tous.
Malgré notre prise de conscience de la réalité temporelle du monde, nous aspirons en une certaine immortalité…
Ils ont joui de la vie, les uns sagement, d’autres avec folie.
Leur ai-je assuré d’être parmi nous pour l’éternité ?
Ils étaient malades.
Personne n’est en mesure de guérir l’autre.
Nous sommes plus ou moins maîtres de l'harmonie relative au sein de notre corps.
Lorsqu'il y a des ruptures trop importantes, l’on peut espérer retarder l’échéance, mais c’est toujours la mort qui nous attend.
Et la mort est-elle une fin en soi ?
La maladie est un désordre que nous tentons à chaque instant de ranger au mieux, en attendant d'autres bouleversements, d'autres troubles ou chaos…
Mourir : nous sommes attentifs et pleins de compassion pour celle ou celui qui s'en va… et lorsque vient notre tour, nous voici pour certains, suppliants, alors que d’autres sont davantage sereins[i].
La mort te fait toujours aussi peur, Sako !
Tu l'as donnée avec tant de passion, toujours pour la bonne cause ! Peut-être pour tenter de repousser l'échéance qui s'annonce ?
La mort…
Tomas se trouve face à la mort… c’est semble-t-il, lui qui la souhaitait ?
[i] Merci à Georges BERNANOS qui a réussi dans sa carrière de triste écrivain chrétien frustré, à réaliser tout de même un bon polar avec « Un crime ».
Sinon, la mort de la fière prieure dans le couvent du « Dialogue des Carmélites » est désespérante…
La petite sœur Blanche a beaucoup plus de dignité et de force vive, en montant à l'échafaud !
— On ne peut pas les laisser ainsi dans ce vaisseau.
Ils vont devenir fous. Nous devons les sauver.
Je tente un rappel d’urgence.
Procédure de contact ?
Yeph :
— Non, laisse-les.
Gil :
— Ils vont tous être kryfluxirés…
Yeph :
— Je sais.
Gil :
— Pourquoi…
Sako :
— Nous pouvons essayer quelque chose, tout de même !
Yeph :
— Écoute, Sako, c’est inutile de jouer maintenant le candide. Pas de zèle entre nous : tu as bien vu les paramètres.
Leurs coordonnées de vie sont déjà déprogrammées. Si tu les extrais du vaisseau, leurs molécules tiendront dix minutes à peine.
Laisse-les mourir entre eux.
Ils ont ainsi une idée de leur mort et des projets pour l’instant présent…
Sako :
— Comment cela ?
Yeph :
— Oui, le temps du compte à rebours leur permet de donner encore un sens à leur vie.
Pour certains, par exemple, c’est l’occasion de me maudire après m’avoir adoré.
La colère réveille à l’extrême leurs sens et tu peux saisir de nouveau, dans leurs traits, des êtres vivants par la passion.
Libérés de l’Extalyne, tu verrais des larves se décomposer en quelques minutes.
Ils sont davantage humains ainsi.
Gil :
— Tu penses donc que nous devons assister — impuissants — à leur mort ?
C'est horrible.
Cette mission avait pour but de les diriger vers le sanatorium de la Base d'Égrêt.
Ils avaient tous misé énormément sur l’aboutissement de ce projet.
Yeph :
— Nul ne te force à regarder…
Rappelle-toi aussi que je ne suis pas maître de la réussite ou non de ce voyage.
Sako :
— Alors tu ne peux pas leur assurer la vie ?
Il y a certainement une solution que tu n’as pas encore proposée ?
Yeph :
— Suis-je un dieu pour que l’on pense qu’en ma présence, le risque zéro puisse exister ?
Sako :
— Je suis totalement abasourdi par ton indifférence, surtout à l’égard de Tomas.
Tu le laisses mourir avec les autres, sans émotion…
Essayons un transfert pour la Base des Cardes ?
Yeph :
— C'est un mythe… une invention de la Guilde pour se débarrasser des gêneurs. Un voyage sans retour !
Elle n'a jamais existé.
Gil :
— Mensonge facile pour te dédouaner.
Là, je suis moi aussi choqué !
Ces êtres fragiles ne sont pas capables de saisir ton attitude d’abandon.
Ils te faisaient confiance…
Yeph :
— Oui, je sais.
Moi aussi j’étais dans la confiance.
Ce vaisseau d'Extalyne a été affrété par la Guilde, avec la bénédiction de l'Archyeur.
Allaient-ils guérir ? Nous l’espérions tous.
Malgré notre prise de conscience de la réalité temporelle du monde, nous aspirons en une certaine immortalité…
Ils ont joui de la vie, les uns sagement, d’autres avec folie.
Leur ai-je assuré d’être parmi nous pour l’éternité ?
Ils étaient malades.
Personne n’est en mesure de guérir l’autre.
Nous sommes plus ou moins maîtres de l'harmonie relative au sein de notre corps.
Lorsqu'il y a des ruptures trop importantes, l’on peut espérer retarder l’échéance, mais c’est toujours la mort qui nous attend.
Et la mort est-elle une fin en soi ?
La maladie est un désordre que nous tentons à chaque instant de ranger au mieux, en attendant d'autres bouleversements, d'autres troubles ou chaos…
Mourir : nous sommes attentifs et pleins de compassion pour celle ou celui qui s'en va… et lorsque vient notre tour, nous voici pour certains, suppliants, alors que d’autres sont davantage sereins[i].
La mort te fait toujours aussi peur, Sako !
Tu l'as donnée avec tant de passion, toujours pour la bonne cause ! Peut-être pour tenter de repousser l'échéance qui s'annonce ?
La mort…
Tomas se trouve face à la mort… c’est semble-t-il, lui qui la souhaitait ?
[i] Merci à Georges BERNANOS qui a réussi dans sa carrière de triste écrivain chrétien frustré, à réaliser tout de même un bon polar avec « Un crime ».
Sinon, la mort de la fière prieure dans le couvent du « Dialogue des Carmélites » est désespérante…
La petite sœur Blanche a beaucoup plus de dignité et de force vive, en montant à l'échafaud !
[Arrivée de Chris.]
Chris :
— Que se passe-t-il ?
Gil :
— L'Offryde a échoué…
Chris :
— Oh…
Sont-ils condamnés ?
Yeph :
— Hélas.
Chris :
— J'entends mon frère Tomas…
C’est pour lui que tu m’as appelé ?
Yeph :
— Il était volontaire pour cette mission.
Il en connaissait les dangers.
Gil :
— C’est inhumain de nous laisser regarder cela…
Ah, quelle horreur !
Comment, Yeph, peux-tu voir disparaître sans réagir, des êtres qui te sont si chers ?
Sako :
— Et nous…
Allons-nous suivre un jour une pareille route ?
Vas-tu aussi nous laisser périr demain ou plus tard ?
Chris :
— Tu ne sembles guère prêt à mourir, Sako ?
Et toi, si cela te dégoûte tant, cher Gil, va te recueillir dans une autre salle !
C'est toujours plaisant les exécutions publiques : on s'offusque, on critique… et la foule se presse !
Vous avez su pourtant sacrifier un grand nombre d’êtres pour arriver à asseoir votre pouvoir, n’est-ce pas ?
Je pensais que la mort ne vous effrayait pas tant.
Sako :
— Yeph, dis quelque chose ?
Ne sois pas aussi insensible…
Chris :
— Qui connaît le cœur de l’autre ?
Vous cherchez un spectacle aussi parmi nous ?
Laisse-les tous les deux, Yeph.
Viens avec moi discuter dans l’autre salle de contrôle.
— Que se passe-t-il ?
Gil :
— L'Offryde a échoué…
Chris :
— Oh…
Sont-ils condamnés ?
Yeph :
— Hélas.
Chris :
— J'entends mon frère Tomas…
C’est pour lui que tu m’as appelé ?
Yeph :
— Il était volontaire pour cette mission.
Il en connaissait les dangers.
Gil :
— C’est inhumain de nous laisser regarder cela…
Ah, quelle horreur !
Comment, Yeph, peux-tu voir disparaître sans réagir, des êtres qui te sont si chers ?
Sako :
— Et nous…
Allons-nous suivre un jour une pareille route ?
Vas-tu aussi nous laisser périr demain ou plus tard ?
Chris :
— Tu ne sembles guère prêt à mourir, Sako ?
Et toi, si cela te dégoûte tant, cher Gil, va te recueillir dans une autre salle !
C'est toujours plaisant les exécutions publiques : on s'offusque, on critique… et la foule se presse !
Vous avez su pourtant sacrifier un grand nombre d’êtres pour arriver à asseoir votre pouvoir, n’est-ce pas ?
Je pensais que la mort ne vous effrayait pas tant.
Sako :
— Yeph, dis quelque chose ?
Ne sois pas aussi insensible…
Chris :
— Qui connaît le cœur de l’autre ?
Vous cherchez un spectacle aussi parmi nous ?
Laisse-les tous les deux, Yeph.
Viens avec moi discuter dans l’autre salle de contrôle.
[Chris et Yeph se téléportent.]
Yeph :
— Merci Chris.
Leurs propos m’insupportent.
Je côtoie la mort depuis si longtemps !
J’avais perdu Tomas une première fois, voici qu’il me faut assister maintenant à sa disparition physique.
C’est très pénible, cependant j’ai le sentiment que cela s'annonce presque comme une libération pour nous deux.
Malgré la douleur de son départ, c’est certainement une délivrance.
Tomas semble me rejoindre enfin.
Il avait saisi depuis peu qu’il se diminuait fortement avec la suppression de la greffe à son retour au Lac de Soufre.
Il craignait de perdre progressivement sa capacité à apprendre, à comprendre et son esprit n’arrivait plus aussi facilement à se fixer.
Chris :
— Les manipulations des sages médecins de l’Archyeur ont détruit en grande partie sa mémoire vive.
Il a été davantage massacré, contrairement à nous pour qui seule, la mémoire fondatrice était affectée.
Yeph :
— Hélas…
Chris :
— Oui, tu as raison…
Avec moi aussi, il s’éloignait sans toujours percevoir notre fraternité qu’il ressentait de moins en moins.
De plus, le fait d'ôter la greffe a provoqué chez lui cette dégénérescence cérébrale.
Encore une erreur médicale qui ne sera pas reconnue.
Il me racontait voici quelques soirs, son désir de mourir car la vie perdait du sens chaque jour.
Il lisait avec difficulté.
[Du vaisseau à la salle de contrôle.]
Tomas :
— Ici Tomas.
J’aimerais communiquer avec Yeph.
Yeph :
— Oui Thomas…
Chris est aussi auprès de moi.
J’ai brouillé les autres bandes passantes de visio-conférence.
Chris :
— Je peux m’éclipser, si tu le souhaites ?
Tomas :
— Non, reste.
Je suis heureux de te savoir présent, petit frère.
Yeph :
— Tu as donc pris conscience de la situation ?
Tomas :
— Oui.
Pour moi.
C’est plus délicat pour les autres…
Quelles sont les chances de s’en sortir ?
Yeph :
— Aucune.
Tomas :
— Je comprends.
Yeph :
— Tu…
Tomas :
— N’en dis pas plus, Yeph.
C’est une épreuve pour celles et ceux qui espéraient beaucoup en un demain meilleur.
Pour mon compte, chaque jour perdait progressivement de sa réalité.
J’ai — je pense — bien vécu avant la Chalystime et aussi depuis le Grand Jour… et même lors de mon arrivée sur les Bases.
J’ai apprécié votre attention à tous les deux, après la suppression de la greffe.
Mon incapacité progressive à aimer et la réduction croissante de mon intellect ne me laissent pas de grands regrets sur ce départ.
Peut-être saurons-nous enfin nous retrouver ?
Je n’ai pas oublié Peter et Pan[i] !
J'aurai préféré avoir cette fois le rôle de Peter…
Sincèrement, je vous aime tous les deux…
Et Franch aussi !
Ah Franch…
Il a été le grand amour extraordinaire de mes rencontres, une force vive de fusions… dans une harmonie ternaire rare et puissante.
Pensez à lui rapporter ces paroles…
Franch est porteur de l'amour humain.
Il sait gérer mieux que quiconque cette plénitude "corps–cœur–esprit" que nous recherchons à travers la philanalyse.
Souviens-toi aussi, Yeph, de tes propos sur l’immortalité de l’âme : j'arrive à ma rencontre, pour te rejoindre.
Et toi, n'oublie pas, Chris, petit frère bien aimé, que la musique est une énergie d'amour extraordinaire.
Sans elle, la communication perdrait de son sens[ii].
Nous serions égarés dans des confidences inachevées.
Merci d'exister à travers cette création. Tu nous offres un jaillissement merveilleux.
J'ai énormément appris de mon existence, sans avoir nécessairement tout compris, et j'ai beaucoup aimé !
Nourrissez-vous tous de moi…
Que Franch ose aussi sans crainte !
Vous qui avez su m'aimer — pour m'enrichir chaque jour davantage — venez extraire la substantifique moelle[iii] de mon existence et vous abreuver de la totalité de mon énergie, lorsque je ne serai plus !
Oui, mes amis, mes amours…
Jean :
— Tomas, viens vite, Léo et Pièr ne réagissent plus. Ils viennent de tomber en léthargie.
Regarde leurs corps…
Tomas :
— Cela sera donc très bientôt fini pour nous aussi[iv].
Je coupe tout contact.
[i] Lors de la mort de PAN, tué par le capitaine… PETER absorbe l'énergie de ce demi-dieu pour devenir PETER PAN…
[ii] Merci encore à Friedrich NIETZSCHE. Dans « Le Crépuscule des Idoles », il se plaît à écrire que « sans musique, la vie serait une erreur » !
[iii] Merci à François RABELAIS. Pour son prologue de « Gargantua » où il nous invite à aller au-delà des mots, pour chercher des trésors !
Voici en vieux français, proposé par Wikipédia, la présentation de RABELAIS pour comprendre son œuvre : « A l’exemple d’icelluy vous convient estre saiges, pour fleurer, sentir et estimer ces beaulx livres de haulte gresse, legiers au prochaz et hardiz à la rencontre ; puis, par curieuse leçon et meditation frequente, rompre l’os et sucer la sustantificque mouelle. ».
[iv] Merci à Gérard LENORMAN pour toutes ses chansons parlant de l'amour humain… et ici, particulièrement la jolie histoire de "Frédéric et l'OVNI" à retrouver.
[L’écran du Vaisseau d'Extalyne s’éteint.]
Chris :
— Tomas ?
Yeph :
— Il a préféré nous épargner son départ.
Viens, allons pleurer loin de l’ombre des voyeurs.
— Tomas ?
Yeph :
— Il a préféré nous épargner son départ.
Viens, allons pleurer loin de l’ombre des voyeurs.
LA FIN DU JOUR
...Et mon soleil expire alors tout devient nuit.
Je n’aurai plus l’éclat d’une étoile pour guide
Au creuset de ma route où j’avance languide.
Me voici comme aveugle, affolé par le bruit
D’un obscur univers qu’il me semblait connaître.
Ainsi s’offrent mes jours à l’heure où tu n’es plus :
Pas à pas l’on me mène à l’antre des exclus...
Loin de toi mon frère, mon amour à renaître.
Ai-je encore un destin, oublié désormais
Pour errer, solitaire, en quête de mon ombre ?
Aidez-moi, je m’éteins, l’avenir est si sombre...
Toute la création savait que je l’aimais :
Lorsque l’astre se lève, il exalte, il oppresse,
Et sa mort, dans le soir, étouffe la promesse.
Je n’aurai plus l’éclat d’une étoile pour guide
Au creuset de ma route où j’avance languide.
Me voici comme aveugle, affolé par le bruit
D’un obscur univers qu’il me semblait connaître.
Ainsi s’offrent mes jours à l’heure où tu n’es plus :
Pas à pas l’on me mène à l’antre des exclus...
Loin de toi mon frère, mon amour à renaître.
Ai-je encore un destin, oublié désormais
Pour errer, solitaire, en quête de mon ombre ?
Aidez-moi, je m’éteins, l’avenir est si sombre...
Toute la création savait que je l’aimais :
Lorsque l’astre se lève, il exalte, il oppresse,
Et sa mort, dans le soir, étouffe la promesse.
Yves Philippe de Francqueville pirate des mots et philanalyste présente le quatrième et dernier tome du Cycle de l'Austrel : la Mort de l'Archyeur.
Cinquième partie.
Tout usage partiel de ces écrits pour servir à la désinformation, serait considéré par l'auteur comme une bassesse journalistique de plus…
Tous droits réservés ©.
Si la version papier vous tente… édition de mai 2016 !
Cinquième partie.
Tout usage partiel de ces écrits pour servir à la désinformation, serait considéré par l'auteur comme une bassesse journalistique de plus…
Tous droits réservés ©.
Si la version papier vous tente… édition de mai 2016 !
Auteur : Yves Philippe de Francqueville