®© Du silence au mensonge,
Des écrits de Yves Philippe de FRANCQUEVILLE
Pirate des mots et philanalyste en herbe.
Tous droits réservés.
Des écrits de Yves Philippe de FRANCQUEVILLE
Pirate des mots et philanalyste en herbe.
Tous droits réservés.
Du silence au mensonge
Chapitre XIX
Mon père a tout prévu.
Les gendarmes nous l'avaient expliqué : Lemire devrait certainement tenter de me retrouver, malgré l'interdiction parentale.
Je suis de plus majeur. J’ai dû — une nouvelle fois encore — donner ma parole de gentilhomme… Faut-il vraiment que j’aime à ce point être gentil ?
Je ne dois pas chercher à contacter Doudou !
Ce jeudi, à la sortie des classes, c'est mon père en personne qui vient me chercher dans la cour de l’école. Une 4L bleue est là, sur le parking du lycée… rien de suspect à l'horizon pour les deux gendarmes de faction. Ma “petite garde personnelle” est assurée jusqu'aux vacances. C’est grandiose ?
Qui est finalement surveillé ?
Lemire ? Qui ne doit pas m’aborder… ou moi-même ? Le sage garçon qui devrait sagement refuser la rencontre…
Le samedi, nous avions prévu avec Yannick une cueillette de gui et de houx pour vendre des bouquets, afin de renflouer la caisse de l'échelon. Étienne ose venir me chercher. Ma mère l'ajourne sans trop de complaisance… L'affaire devrait se régler rapidement, pensent les parents. La gendarmerie agit… attendons, et laissons passer les fêtes de fin d'année.
Soyons vigilants.
Ces fêtes m'inquiètent davantage que le reste. Que vais-je faire pendant les vacances ?
B**-les-Templiers me manque.
Il n'est officiellement plus question que j'aille à B**. C’est formel. Il me faut soit obéir, soit fuguer… Je quitte alors définitivement la maison pour l’aventure chevaleresque…
Mais je n’ai même pas mon bac… et pas un sou vaillant ! Je me sens presque lâche.
Les parents sont plus conciliants avec moi, inquiets certainement de me voir faire une folie.
Ils craignent donc que je me suicide, ou que je fugue…
J’ai perdu encore un peu plus le goût pour cette vie qui s’annonce à moi toujours plus maussade.
Fier ?
Toujours.
Des idées plein la tête.
Je veux tenter de reprendre mon espace de vie, et rechercher le plaisir de l’instant. Nous penserons davantage à demain lorsqu’il s’annoncera.
J'aimerais partir au ski.
Après quelques difficiles entretiens familiaux, l'accord est passé.
Nous nous rendrons tous à Orcières-Merlette pour Noël… moi compris.
Je passe quinze jours de ski forts agréables… où j'essaie d'apprécier le meilleur de toute mon aventure.
Les gendarmes nous l'avaient expliqué : Lemire devrait certainement tenter de me retrouver, malgré l'interdiction parentale.
Je suis de plus majeur. J’ai dû — une nouvelle fois encore — donner ma parole de gentilhomme… Faut-il vraiment que j’aime à ce point être gentil ?
Je ne dois pas chercher à contacter Doudou !
Ce jeudi, à la sortie des classes, c'est mon père en personne qui vient me chercher dans la cour de l’école. Une 4L bleue est là, sur le parking du lycée… rien de suspect à l'horizon pour les deux gendarmes de faction. Ma “petite garde personnelle” est assurée jusqu'aux vacances. C’est grandiose ?
Qui est finalement surveillé ?
Lemire ? Qui ne doit pas m’aborder… ou moi-même ? Le sage garçon qui devrait sagement refuser la rencontre…
Le samedi, nous avions prévu avec Yannick une cueillette de gui et de houx pour vendre des bouquets, afin de renflouer la caisse de l'échelon. Étienne ose venir me chercher. Ma mère l'ajourne sans trop de complaisance… L'affaire devrait se régler rapidement, pensent les parents. La gendarmerie agit… attendons, et laissons passer les fêtes de fin d'année.
Soyons vigilants.
Ces fêtes m'inquiètent davantage que le reste. Que vais-je faire pendant les vacances ?
B**-les-Templiers me manque.
Il n'est officiellement plus question que j'aille à B**. C’est formel. Il me faut soit obéir, soit fuguer… Je quitte alors définitivement la maison pour l’aventure chevaleresque…
Mais je n’ai même pas mon bac… et pas un sou vaillant ! Je me sens presque lâche.
Les parents sont plus conciliants avec moi, inquiets certainement de me voir faire une folie.
Ils craignent donc que je me suicide, ou que je fugue…
J’ai perdu encore un peu plus le goût pour cette vie qui s’annonce à moi toujours plus maussade.
Fier ?
Toujours.
Des idées plein la tête.
Je veux tenter de reprendre mon espace de vie, et rechercher le plaisir de l’instant. Nous penserons davantage à demain lorsqu’il s’annoncera.
J'aimerais partir au ski.
Après quelques difficiles entretiens familiaux, l'accord est passé.
Nous nous rendrons tous à Orcières-Merlette pour Noël… moi compris.
Je passe quinze jours de ski forts agréables… où j'essaie d'apprécier le meilleur de toute mon aventure.
C'est bien difficile…
je ne puis m'empêcher
de regretter la Commanderie.
Je sais pourquoi
le besoin d'y retourner est si fort.
J'aurais préféré sincèrement
que l'affaire se déclenche
après Noël.
J’aurais été adoubé Chevalier…
Après, ma force de liberté
me permettait d’agir à ma guise !
Retourner ensuite à B**.
Même sans Yvon.
Surtout sans Yvon…
Quoique ?
Il a des connaissances
qui m’intéressent.
L'aura dégagée par ce lieu
m'enchante,
me fascine,
me bouleverse.
Les livres,
les peintures,
le cadre fantastique…
De toutes les façons
je suis malheureux.
Malheureux pour toujours ?
Ce serait un terrible échec.
Le bonheur,
que j'espérais en toute innocence,
semble à jamais souillé
par leurs complots
d'adultes minables.
Pourtant,
j'ai foi en cet idéal
enseigné par des professeurs
corrompus.
J'aimerais mourir et rester en montagne.
Je m'oublie dans des descentes
toujours plus difficiles,
toujours plus dangereuses.
Grisé par la vitesse,
happé par le vide,
mon cœur parfois se pince
lors de pensées extrêmes.
J'espère secrètement que la mort m'appelle.
J'espère en finir vite.
Très vite.
je ne puis m'empêcher
de regretter la Commanderie.
Je sais pourquoi
le besoin d'y retourner est si fort.
J'aurais préféré sincèrement
que l'affaire se déclenche
après Noël.
J’aurais été adoubé Chevalier…
Après, ma force de liberté
me permettait d’agir à ma guise !
Retourner ensuite à B**.
Même sans Yvon.
Surtout sans Yvon…
Quoique ?
Il a des connaissances
qui m’intéressent.
L'aura dégagée par ce lieu
m'enchante,
me fascine,
me bouleverse.
Les livres,
les peintures,
le cadre fantastique…
De toutes les façons
je suis malheureux.
Malheureux pour toujours ?
Ce serait un terrible échec.
Le bonheur,
que j'espérais en toute innocence,
semble à jamais souillé
par leurs complots
d'adultes minables.
Pourtant,
j'ai foi en cet idéal
enseigné par des professeurs
corrompus.
J'aimerais mourir et rester en montagne.
Je m'oublie dans des descentes
toujours plus difficiles,
toujours plus dangereuses.
Grisé par la vitesse,
happé par le vide,
mon cœur parfois se pince
lors de pensées extrêmes.
J'espère secrètement que la mort m'appelle.
J'espère en finir vite.
Très vite.
À notre retour en Picardie, une lettre d'Yvon m’attend.
Elle est arrivée certainement après notre départ pour la montagne.
Cela me fait perdre davantage les pédales…
À la fois émerveillé et inquiet à la lecture du texte, je suis prêt à repartir :
Elle est arrivée certainement après notre départ pour la montagne.
Cela me fait perdre davantage les pédales…
À la fois émerveillé et inquiet à la lecture du texte, je suis prêt à repartir :
B **, ce 21 décembre 198*
+
P A X
Jesus caritas est
+
P A X
Jesus caritas est
De la commanderie,
Beau et doux ami Écuyer Accompli.
Apprenti Chevalier,
Cher Philippe,
Dois-je encore employer ce nom à ton égard ? Cette charge dont tu sembles t'être débarrassée d'un coup de tête est-elle encore bien dans ton cœur ?
Que dire ? Que penser ?
Pas un mot de toi ou un élégant coup de téléphone.
Rien !
Où est la gentilhommerie qui devrait aller de pair avec ta naissance ?
Quelle sirène dévoreuse et dévoyeuse t'a obscurci la clarté de tes origines, de ton nom, à nos yeux ? Car enfin, parole de gentilhomme vaut mieux et bien plus que parchemins ou acte notarié de robin !
Faudrait-il que je doute de ta parole prononcée par devant nos anciens et le Seigneur, en l'honneur de Notre Dame ?
Je ne puis m'y résoudre ; peut-être est-ce le désarroi d'une situation nouvelle ; la crainte — je ne veux pas parler de peur — d'un avenir à affronter ou je ne sais quelques bonnes raisons dont l'enfer est pavé…
Qu'importe. Un mot de toi, une rencontre sans faux-fuyant ne serait pas plus conforme à ton sang ?
J'attends pour l'instant dans le silence et la prière car après tout, cet appel à vivre parmi nous tu l'as reçu de Dieu et pour la gloire de Dieu.
Je sais que l'âge par où tu passes est celui des tempêtes, que tu traverses les unes après les autres. Je croyais qu'ici tu avais commencé à trouver une part de salut… et qui sait peut-être as-tu eu peur de ce trop grand calme, de cette paix dont je t'ai parlé et tu préfères remettre la voile comme celui que je connais bien et qui mit quinze ans avant de revenir blessé et disponible. Je ne te souhaite pas une telle traversée… Mais la docilité est-elle en toi une preuve de courage ?
Je l'aimerais !
Enfin, dernière remarque : la recherche des ancêtres est bonne en soi mais elle doit déboucher sur l'actualisation dans l'incarnation d'aujourd'hui (nous sommes au temps de la méditation de celle de notre Maître le Christ). Si elle débouche sur l'enflure et la satisfaction, elle est nocive et ne peut que faire naître les fleurs de l'hellébore noire et non les roses de Noël.
Pour l'instant je t'attends : blessé, un peu déçu, en tout cas inquiet…
J'aimerais te voir fidèle et plus lumineux que l'étoile des Rois Mages — celle qui une fois fixée permet de tracer droit son sillon dans la fidélité.
Macte gene rose puer sic itur ad astra.
Je te quitte par l'écrit, te gardant présent malgré la présence de ton absence. J'espère que tu t'es trompé dans les formes et que tu auras l'obligeance de me demander quelques explications sur les formes que peuvent prendre ton engagement en fonction de ton avenir proche et que tu liras ces lignes avec bienveillance.
Bonne fête de Noël et de l'Incarnation, mes respects à tes parents.
Dieu par Notre Dame te garde, je t'embrasse fraternellement :
Yvon Ray
P.S. La commanderie peut toujours t'accueillir sans chaperon si tu le juges bon ou avec qui tu veux !
Amicalement.
Beau et doux ami Écuyer Accompli.
Apprenti Chevalier,
Cher Philippe,
Dois-je encore employer ce nom à ton égard ? Cette charge dont tu sembles t'être débarrassée d'un coup de tête est-elle encore bien dans ton cœur ?
Que dire ? Que penser ?
Pas un mot de toi ou un élégant coup de téléphone.
Rien !
Où est la gentilhommerie qui devrait aller de pair avec ta naissance ?
Quelle sirène dévoreuse et dévoyeuse t'a obscurci la clarté de tes origines, de ton nom, à nos yeux ? Car enfin, parole de gentilhomme vaut mieux et bien plus que parchemins ou acte notarié de robin !
Faudrait-il que je doute de ta parole prononcée par devant nos anciens et le Seigneur, en l'honneur de Notre Dame ?
Je ne puis m'y résoudre ; peut-être est-ce le désarroi d'une situation nouvelle ; la crainte — je ne veux pas parler de peur — d'un avenir à affronter ou je ne sais quelques bonnes raisons dont l'enfer est pavé…
Qu'importe. Un mot de toi, une rencontre sans faux-fuyant ne serait pas plus conforme à ton sang ?
J'attends pour l'instant dans le silence et la prière car après tout, cet appel à vivre parmi nous tu l'as reçu de Dieu et pour la gloire de Dieu.
Je sais que l'âge par où tu passes est celui des tempêtes, que tu traverses les unes après les autres. Je croyais qu'ici tu avais commencé à trouver une part de salut… et qui sait peut-être as-tu eu peur de ce trop grand calme, de cette paix dont je t'ai parlé et tu préfères remettre la voile comme celui que je connais bien et qui mit quinze ans avant de revenir blessé et disponible. Je ne te souhaite pas une telle traversée… Mais la docilité est-elle en toi une preuve de courage ?
Je l'aimerais !
Enfin, dernière remarque : la recherche des ancêtres est bonne en soi mais elle doit déboucher sur l'actualisation dans l'incarnation d'aujourd'hui (nous sommes au temps de la méditation de celle de notre Maître le Christ). Si elle débouche sur l'enflure et la satisfaction, elle est nocive et ne peut que faire naître les fleurs de l'hellébore noire et non les roses de Noël.
Pour l'instant je t'attends : blessé, un peu déçu, en tout cas inquiet…
J'aimerais te voir fidèle et plus lumineux que l'étoile des Rois Mages — celle qui une fois fixée permet de tracer droit son sillon dans la fidélité.
Macte gene rose puer sic itur ad astra.
Je te quitte par l'écrit, te gardant présent malgré la présence de ton absence. J'espère que tu t'es trompé dans les formes et que tu auras l'obligeance de me demander quelques explications sur les formes que peuvent prendre ton engagement en fonction de ton avenir proche et que tu liras ces lignes avec bienveillance.
Bonne fête de Noël et de l'Incarnation, mes respects à tes parents.
Dieu par Notre Dame te garde, je t'embrasse fraternellement :
Yvon Ray
P.S. La commanderie peut toujours t'accueillir sans chaperon si tu le juges bon ou avec qui tu veux !
Amicalement.
Maman, qui a trouvé la lettre en même temps que moi — bien que je ne veuille pas la lui laisser lire — se doutant d'un nouveau problème, à la vue de mon état… se sent obligée d'appeler de nouveau le lieutenant de gendarmerie.
Il tâche de m'expliquer, sans réussir à me convaincre, ce qu'il adviendrait de ma petite personne si je me retrouvais à B** pour un prochain séjour.
Je dois essayer de lire entre les lignes, de trouver tout ce qui y est caché… Pauvre petit lieutenant !
Les parents ont peur, notamment pour mon état psychique.
Psy… psychologue, psychiatre, psychothérapeute, psychanalyste ?
J'aimerais beaucoup prendre rendez-vous avec ceux que l'on considère dans nos familles comme des espèces de fous dangereux. Ils ont trop peur que je les quitte en écoutant ces personnes souvent sans foi ni loi et… obsédés par tout ce qui tourne autour du sexe.
Aussi, la ville est à trente cinq kilomètres, et c'est un peu loin pour des rendez-vous hebdomadaires. Je réserve ce projet, ne voulant abandonner un domaine où des portes sont à ouvrir : je crois en effet qu'un psychanalyste ayant été bercé dans un idéal chrétien, tout en étant enfin détaché de toutes craintes divines, peut être d'une grande aide pour beaucoup.
La surveillance à l'école continue.
Cela commence à se gâter le 5 janvier : Lemire fait passer par l'intermédiaire d'Olivier — dans la classe de mon petit frère — une lettre m'étant destinée.
Il me la donne discrètement, sans pouvoir s'empêcher d'en dire un mot lors du dîner devant les parents :
Sous la menace familiale, je dois la leur montrer :
Il tâche de m'expliquer, sans réussir à me convaincre, ce qu'il adviendrait de ma petite personne si je me retrouvais à B** pour un prochain séjour.
Je dois essayer de lire entre les lignes, de trouver tout ce qui y est caché… Pauvre petit lieutenant !
Les parents ont peur, notamment pour mon état psychique.
Psy… psychologue, psychiatre, psychothérapeute, psychanalyste ?
J'aimerais beaucoup prendre rendez-vous avec ceux que l'on considère dans nos familles comme des espèces de fous dangereux. Ils ont trop peur que je les quitte en écoutant ces personnes souvent sans foi ni loi et… obsédés par tout ce qui tourne autour du sexe.
Aussi, la ville est à trente cinq kilomètres, et c'est un peu loin pour des rendez-vous hebdomadaires. Je réserve ce projet, ne voulant abandonner un domaine où des portes sont à ouvrir : je crois en effet qu'un psychanalyste ayant été bercé dans un idéal chrétien, tout en étant enfin détaché de toutes craintes divines, peut être d'une grande aide pour beaucoup.
La surveillance à l'école continue.
Cela commence à se gâter le 5 janvier : Lemire fait passer par l'intermédiaire d'Olivier — dans la classe de mon petit frère — une lettre m'étant destinée.
Il me la donne discrètement, sans pouvoir s'empêcher d'en dire un mot lors du dîner devant les parents :
- — Alors Philippe, c'était quoi la lettre d'Olivier ?
Sous la menace familiale, je dois la leur montrer :
Cher Philippe,
Ne me laisse pas dans l'incertitude, c'est une situation dont j'ai horreur.
Si d'ici la fin de la semaine je n'ai pas de rendez-vous ou un petit mot de toi, j'emploierai les grands moyens pour te retrouver. N'oublie pas que tu es majeur et la force de ton caractère ne doit pas plier sous le joug de tes parents.
L'engagement pris par toi en entrant dans l'Observance ne peut être oublié et bafoué sans en payer les conséquences.
Il faut aussi que je te voie surtout afin de récupérer la règle des pages et écuyers que je t'ai prêtée : je n'ai que celle-là et j'en ai fort besoin en ce moment.
Philippe, je te dis donc à très bientôt,
Doudou.
Ne me laisse pas dans l'incertitude, c'est une situation dont j'ai horreur.
Si d'ici la fin de la semaine je n'ai pas de rendez-vous ou un petit mot de toi, j'emploierai les grands moyens pour te retrouver. N'oublie pas que tu es majeur et la force de ton caractère ne doit pas plier sous le joug de tes parents.
L'engagement pris par toi en entrant dans l'Observance ne peut être oublié et bafoué sans en payer les conséquences.
Il faut aussi que je te voie surtout afin de récupérer la règle des pages et écuyers que je t'ai prêtée : je n'ai que celle-là et j'en ai fort besoin en ce moment.
Philippe, je te dis donc à très bientôt,
Doudou.
Mon père est furieux. Il prend la plume le soir même :
Le 5 janvier 198*
Monsieur,
En ma qualité de chef de famille, je tiens à vous informer que je vous somme de cesser d'importuner mon fils Philippe.
Vos façons de faire ne conviennent pas du tout à l'idéal d'un mouvement tel que vous nous l'aviez présenté.
En cas de récidive de votre part, ou de l'un de vos tiers, vous aurez à m'en rendre compte.
Veuillez croire monsieur, en mes sentiments réservés :
Louis de Bourlon.
Monsieur,
En ma qualité de chef de famille, je tiens à vous informer que je vous somme de cesser d'importuner mon fils Philippe.
Vos façons de faire ne conviennent pas du tout à l'idéal d'un mouvement tel que vous nous l'aviez présenté.
En cas de récidive de votre part, ou de l'un de vos tiers, vous aurez à m'en rendre compte.
Veuillez croire monsieur, en mes sentiments réservés :
Louis de Bourlon.
Ne voulant en rester là, une lettre part à Yvon, deux autres à l'aumônier et au Colonel commandant de la Base Aérienne de D**, deux amis et partenaires de bridge.
Il est grand temps — selon l'avis de mon père — que Lemire cesse ses agissements néfastes.
Ah, politiques et religions sont les maîtres de ce monde… Sabre et goupillon !
Le résultat n'est pas celui espéré par les parents…
Il est grand temps — selon l'avis de mon père — que Lemire cesse ses agissements néfastes.
Ah, politiques et religions sont les maîtres de ce monde… Sabre et goupillon !
Le résultat n'est pas celui espéré par les parents…
* * *
Après deux semaines sans aucune nouvelle, ma mère a la visite, un après midi, d'une petite dame maigrelette, triste et effacée : madame Lemire en personne.
Je suis là pour l’accueillir.
Elle a trouvé la lettre de papa et espère nous aider…
C’est surtout pour qu'elle puisse enfin en finir avec son époux : elle ne supporte plus — à ses dires — de vivre en sa compagnie, de subir ses colères et ses coups.
Sans argent, elle préfère se séparer d'un homme qui terrorise ses deux enfants.
Elle a surtout trouvé un autre homme qui lui plaît davantage.
Maman ne saisit pas très l’aide qu’elle peut apporter.
J’apprécie mieux cet événement, car madame Lemire n'est pas venue les mains vides : en fouillant dans les affaires personnelles de son mari, elle en a puisé quelques papiers intéressants !
Tout d'abord une lettre d'Yvon étant destinée à papa… envoyée à Lemire avec un petit mot pour la lui faire parvenir. Il n'a pas osé apparemment, ou n’en a pas eu le temps :
Je suis là pour l’accueillir.
Elle a trouvé la lettre de papa et espère nous aider…
C’est surtout pour qu'elle puisse enfin en finir avec son époux : elle ne supporte plus — à ses dires — de vivre en sa compagnie, de subir ses colères et ses coups.
Sans argent, elle préfère se séparer d'un homme qui terrorise ses deux enfants.
Elle a surtout trouvé un autre homme qui lui plaît davantage.
Maman ne saisit pas très l’aide qu’elle peut apporter.
J’apprécie mieux cet événement, car madame Lemire n'est pas venue les mains vides : en fouillant dans les affaires personnelles de son mari, elle en a puisé quelques papiers intéressants !
Tout d'abord une lettre d'Yvon étant destinée à papa… envoyée à Lemire avec un petit mot pour la lui faire parvenir. Il n'a pas osé apparemment, ou n’en a pas eu le temps :
Le 11 janvier 198*
De la commanderie,
Cher Alain,
Amuse toi bien, j'avais envie de terminer la lettre comme ceci :
Et au demeurant monsieur,
vous êtes trop con pour que je vous fasse l'honneur d'une si longue lettre que votre conne-épouse ne comprendra même pas…
Mais je ne suis pas un polémiste !
Au fait, corrige les fautes éventuelles, ça fera aussi bien car ce genre de personne est capable de montrer la lettre !
Amitié.
Dieu par Notre Dame te garde,
Yvon
De la commanderie,
Cher Alain,
Amuse toi bien, j'avais envie de terminer la lettre comme ceci :
Et au demeurant monsieur,
vous êtes trop con pour que je vous fasse l'honneur d'une si longue lettre que votre conne-épouse ne comprendra même pas…
Mais je ne suis pas un polémiste !
Au fait, corrige les fautes éventuelles, ça fera aussi bien car ce genre de personne est capable de montrer la lettre !
Amitié.
Dieu par Notre Dame te garde,
Yvon
Ce mot était avec la lettre pour papa :
B**, ce 10 janvier 198*.
Monsieur,
La franchise est très rare et l'erreur fourmille. C'est à vrai dire avec une surprise atténuée que j'ai reçu le rapport de ce que vous avez transmis au gouverneur local de notre association. Elles sont les conséquences de dires d'une — votre parente — notre voisine paraît-il ? Qui me connaîtrait très bien ?
Curieux, je ne fréquente ici que les plus démunis.
Certains disent la “pègre”, je préfère les appeler les “pauvres”.
Réserve faite du respect dû aux dames en général et à votre informatrice en particulier qui a pu être trompée, permettez moi s'il-vous-plaît de citer le proverbe : qui n'entend qu'un son n'entend qu'une cloche.
Je pourrais vous désigner quelques gens qui me connaissent depuis plus de vingt ans : les unes, comme votre famille, sont de l'A.N.F.(1) d'autres accusent aussi particules, d'autres sont moines bénédictins d'abbayes proches de chez vous… mais est-ce bien nécessaire ?
Votre siège est sans doute fait, alors que vous importe, du moment que vous avez votre tranquillité et votre vérité… c'est facile !
La Vérité est que la médisance est un péché ; quand elle s'enfle, cela s'appelle la calomnie et judiciairement la diffamation.
Responsable d'une œuvre entreprise depuis plus de trente ans, présent ici depuis quatorze années dans les pires conditions, réalisant ce qui doit être fait, je ne vois pas en quoi je serais un instable. Quant à l'illumination, ceux qui me connaissent savent ma manière de voir à ce sujet.
Bien sûr, pour le reste, je tiens à votre disposition des documents officiels qui réduisent à néant les propos de concierges que colportent avec délectation les gens de basse-cour et les préposés aux basses œuvres de police.
Il eut été plus simple et franc de me proposer une rencontre à laquelle je me serais prêté volontiers. Hélas, les faux-semblants et faux-fuyants que vous avez employés en artifice et dont je ne fus pas dupe, ne me permettent pas de penser que vous le souhaitiez. Sans doute cette lettre comme l'autre adressée à votre fils n'aura pas de réponse. Telle est votre volonté.
À Dieu va !
Philippe est un garçon de valeur. Il mérite un avenir grandiose. Il a l’âme d’un chevalier. Je regrette que l'éducation qu'il a reçue l’ait rendu esclave, prisonnier d'une famille sans idéal. Aussi, je demanderai réparation de l'offense à qui de droit, par qui il faut. Vous devez comprendre qu'assumant des fonctions importantes, je ne puis plus longtemps tolérer des procédés déloyaux et calomnieux.
Je me dois de faire taire de tels ragots, surtout lorsqu'ils viennent de gens qui normalement devraient nous être nativement et naturellement favorables, et semblent totalement nous méconnaître.
En vérité, ces personnes ne savent rien de nous parce qu'elles ne veulent savoir que les cancans, aliments bien connus de salons où l'on papote et ne réalise rien. Je vous ai écrit franchement ma manière de considérer ces faits. Comprenez je vous prie mon indignation et mon inquiétude.
Veuillez aussi avoir la bienveillance de me donner, monsieur, des raisons de croire que vous et votre informatrice avez été trompés. Auquel cas, réparations faites, j'oublierai l'injure.
Je vous prierai alors de recevoir monsieur, l'expression de mes respectueuses salutations.
Votre seul acte sensé et légitime serait de libérer votre fils de tout carcan, pour lui laisser accomplir l’œuvre pour laquelle il est appelé !
Yvon Ray.
[1] A.N.F. : Association d'entraide de la Noblesse Française. C'est une association loi 1901 créée pour toutes les familles nobles de France désirant cotiser (environ 2000 familles).
B**, ce 10 janvier 198*.
Monsieur,
La franchise est très rare et l'erreur fourmille. C'est à vrai dire avec une surprise atténuée que j'ai reçu le rapport de ce que vous avez transmis au gouverneur local de notre association. Elles sont les conséquences de dires d'une — votre parente — notre voisine paraît-il ? Qui me connaîtrait très bien ?
Curieux, je ne fréquente ici que les plus démunis.
Certains disent la “pègre”, je préfère les appeler les “pauvres”.
Réserve faite du respect dû aux dames en général et à votre informatrice en particulier qui a pu être trompée, permettez moi s'il-vous-plaît de citer le proverbe : qui n'entend qu'un son n'entend qu'une cloche.
Je pourrais vous désigner quelques gens qui me connaissent depuis plus de vingt ans : les unes, comme votre famille, sont de l'A.N.F.(1) d'autres accusent aussi particules, d'autres sont moines bénédictins d'abbayes proches de chez vous… mais est-ce bien nécessaire ?
Votre siège est sans doute fait, alors que vous importe, du moment que vous avez votre tranquillité et votre vérité… c'est facile !
La Vérité est que la médisance est un péché ; quand elle s'enfle, cela s'appelle la calomnie et judiciairement la diffamation.
Responsable d'une œuvre entreprise depuis plus de trente ans, présent ici depuis quatorze années dans les pires conditions, réalisant ce qui doit être fait, je ne vois pas en quoi je serais un instable. Quant à l'illumination, ceux qui me connaissent savent ma manière de voir à ce sujet.
Bien sûr, pour le reste, je tiens à votre disposition des documents officiels qui réduisent à néant les propos de concierges que colportent avec délectation les gens de basse-cour et les préposés aux basses œuvres de police.
Il eut été plus simple et franc de me proposer une rencontre à laquelle je me serais prêté volontiers. Hélas, les faux-semblants et faux-fuyants que vous avez employés en artifice et dont je ne fus pas dupe, ne me permettent pas de penser que vous le souhaitiez. Sans doute cette lettre comme l'autre adressée à votre fils n'aura pas de réponse. Telle est votre volonté.
À Dieu va !
Philippe est un garçon de valeur. Il mérite un avenir grandiose. Il a l’âme d’un chevalier. Je regrette que l'éducation qu'il a reçue l’ait rendu esclave, prisonnier d'une famille sans idéal. Aussi, je demanderai réparation de l'offense à qui de droit, par qui il faut. Vous devez comprendre qu'assumant des fonctions importantes, je ne puis plus longtemps tolérer des procédés déloyaux et calomnieux.
Je me dois de faire taire de tels ragots, surtout lorsqu'ils viennent de gens qui normalement devraient nous être nativement et naturellement favorables, et semblent totalement nous méconnaître.
En vérité, ces personnes ne savent rien de nous parce qu'elles ne veulent savoir que les cancans, aliments bien connus de salons où l'on papote et ne réalise rien. Je vous ai écrit franchement ma manière de considérer ces faits. Comprenez je vous prie mon indignation et mon inquiétude.
Veuillez aussi avoir la bienveillance de me donner, monsieur, des raisons de croire que vous et votre informatrice avez été trompés. Auquel cas, réparations faites, j'oublierai l'injure.
Je vous prierai alors de recevoir monsieur, l'expression de mes respectueuses salutations.
Votre seul acte sensé et légitime serait de libérer votre fils de tout carcan, pour lui laisser accomplir l’œuvre pour laquelle il est appelé !
Yvon Ray.
[1] A.N.F. : Association d'entraide de la Noblesse Française. C'est une association loi 1901 créée pour toutes les familles nobles de France désirant cotiser (environ 2000 familles).
Les parents auraient préféré que je ne puisse pas lire cette lettre…
Je n'ai pas le droit d'en ajouter au risque de remontrances sérieuses.
Selon les parents, c'est le deuxième document qui leur semble le plus important pour éclaircir les activités de l'Observance.
À travers un extrait de journal de bord, on perçoit la formidable organisation de ce mouvement où l'on devine, à ma plus grande joie, que Lemire et Ray, comme tous les autres, ne sont que les pions de supérieurs, qui leur étaient inconnus.
J’ai réussi à récupérer l'intégrale des feuilles dactylographiées, données par madame Lemire.
Ce texte avait très certainement été lu par un adjoint de Ray, envoyé sur D** à l'époque :
- — Ce sont de nouvelles preuves du danger représenté par cet homme, m'explique mon père. il est fou même de l'écrire… car il se trahit ainsi.
- — Pourquoi ne pas croire en ses propos ? osais-je renchérir. il a l'air tout à fait sincère et honnête !
Je n'ai pas le droit d'en ajouter au risque de remontrances sérieuses.
Selon les parents, c'est le deuxième document qui leur semble le plus important pour éclaircir les activités de l'Observance.
À travers un extrait de journal de bord, on perçoit la formidable organisation de ce mouvement où l'on devine, à ma plus grande joie, que Lemire et Ray, comme tous les autres, ne sont que les pions de supérieurs, qui leur étaient inconnus.
J’ai réussi à récupérer l'intégrale des feuilles dactylographiées, données par madame Lemire.
Ce texte avait très certainement été lu par un adjoint de Ray, envoyé sur D** à l'époque :
Réunion du samedi 28 novembre 197*.
Rappel historique.
Ce qui suit intéresse surtout les nouveaux mais les anciens doivent également écouter.
Pourquoi commencer cette réunion par un rappel historique ? C'est uniquement pour que vous puissiez mieux comprendre le cadre dans lequel nous allons évoluer et pour mieux en définir les buts.
Notre groupe ou Échelon (nous verrons tout à l'heure ce qu'est un Échelon) fait partie d'un ensemble d'Échelons situé un peu partout en France : En Lorraine, en Bourgogne, en Anjou, dans les Landes et chez vous, en Picardie. Tous font partie de l'O.M.C. c'est le sigle de notre mouvement. Cela veut dire en latin : Observantia Militum Christe ; traduit dans notre langue on nous appelle les Chevaliers Militaires du Christ.
L'O.M.C. fait partie des ordres chevaleresques religieux.
Comment ce mouvement est-il venu jusque chez vous ?
Alain qui avait des responsabilités dans le scoutisme en France a entendu parler pour la première fois de l'Observance en 197* par un de ses amis, chef scout en Belgique. Après avoir longuement réfléchi et posé toutes les questions sur cette organisation et sur les buts de ce mouvement, il s'est rendu compte que l'on pratiquait dans ce mouvement un idéal de vie au-delà des espérances que le meilleur des scoutismes saurait proposer. Il prit contact en 197* avec la Commanderie de Bourgogne pour saisir de visu ce que l'on y faisait. Il revint encore plusieurs fois à B ** et en 197* il officialisa son entrée chez nous.
Après avoir bien fait connaissance avec les règles et les buts de l'O.M.C. ainsi que des personnes qui en font partie, il décida en 197* de créer un Échelon expérimental avec des garçons qui n'avaient pas l'habitude de vivre en groupe (la plus part des autres Échelons ont des jeunes issus du scoutisme). Le premier garçon recruté était Bernard J… en octobre 197*, suivi de Frédéric B… début 197*. En juin 197*, Bernard fit un camp de formation d'une dizaine de jours à B **. En septembre 197*, c'était au tour de Frédéric et de Lionel à venir grossir les rangs. Puis, au début de cette année 197*, c'est Eric B… qui rentra dans le groupe et Thierry Z… suivi des trois frères P… Ainsi l'Échelon de D ** prenait corps.
Le 11 mai 197*, sous la haute autorité du moine chevalier Yvon Ray, précepteur de la Commanderie de B ** -les-Templiers, avec l'accord du Chapitre, est érigé en la citadelle de D ** un Échelon de Pages et d'Écuyers de France, placé sous l'autorité d'Alain Lemire, chevalier hospitalier, qui fut intronisé à l'occasion, Gouverneur de D **.
Afin de vous familiariser avec certains mots et pour que vous puissiez connaître la hiérarchie dans l'Observance, nous allons voir les structures de notre mouvement.
À la base se trouvent les Pages jusqu'à 13 - 14 ans. Ils sont formés par leurs Écuyers responsables d'eux. Il y a deux sortes d'Écuyers : les “Hors Pages” (14 à 16 ans) et les “Accomplis” (17 à 19 ans). Un Écuyer et un Page forment ce que nous appelons un Équipage.
Au dessus de l'Écuyer accompli, se trouve le prétendant en chevalerie (20 à 23 ans). Ensuite, en montant toujours vers le haut nous trouvons les Chevaliers, les Accomplis, puis les Chevaliers Gouverneurs, et encore au dessus il y a les Précepteurs. À leur égal, sont les Chapelains (généralement des pères ermites bénédictins). Bien d'autres rangs existent encore pour arriver tout en haut de cette pyramide qu'est notre hiérarchie, où se trouve le Grand Maître. Votre constance et votre sagesse vous permettront peut-être un jour de le rencontrer.
Maintenant, voyons l'organisation : nous avons vu ce qu'est un Équipage. 7 ou 8 Équipages maximum forment un Échelon sous l'autorité d'un chef d'Échelon élu par les Écuyers. 4 Échelons forment une Échelle, avec son chef désigné parmi les chefs d'Échelon, par le Gouverneur.
Chefs d'Échelon et chef d'Échelle sont sous l'autorité d'un Chevalier pour les premiers, et d'un Gouverneur pour le deuxième. (Une Échelle rassemble environ 60 garçons).
4 Échelles forment une Lance. Cette dernière est toujours commandée par un Chevalier sous l'autorité d'un Gouverneur. Elle comprend généralement plus de 200 garçons.
Nous venons donc de voir comment est structurée l'Observance. Les mêmes règles sont employées à l'étranger.
Les nouveaux, maintenant ceci vous intéresse au premier plan. Sachez que si vous êtes acceptés comme Page ou comme Écuyer, vous aurez également à choisir la couleur de vos barrettes. Il existe trois couleurs représentant trois spécialités différentes par leur appellation, mais surtout par leur compétence :
* Rouge : pour l'intervention.
Qu'elle soit civile ou militaire, en France ou à l'étranger.
* Bleue : pour les guides de Route.
Les missions de reconnaissance et de renseignement.
* Verte : pour les guides d'accueil.
Les missions de protection et de services en campagne, pour héberger et nourrir nos hommes.
Cependant, avant d'en arriver là, il vous faudra passer des épreuves afin que le Chef d'Échelon et le Gouverneur puissent savoir si vous êtes capables et dignes de faire parti des Pages ou des Écuyers. N'essayez pas de savoir auprès des anciens à quoi correspondent ces épreuves : ils commettraient une grande faute s'ils transgressaient notre loi du silence — ou de discrétion si vous préférez. Nous vous l'avons déjà dit et là, je m'adresse à tous. Nous vous le répétons car c'est important. Toutes nos activités — et non pas seulement pour les épreuves — ne doivent pas êtres connues de personnes étrangères à l'Échelon ; non pas parce que nous avons quelque chose à cacher (nous n'avons rien à cacher) mais ce silence est simplement souhaité pour vous apprendre à être discret. Quelqu'un de discret est toujours efficace par contre un homme qui parle trop est souvent dangereux et par conséquent nous ne pouvons pas lui faire confiance : donc il n'a pas sa place chez nous puisque tout est basé sur la confiance.
Autre chose, soyez curieux par exemple du passé de votre Commanderie, curieux de savoir comment vivaient les pages et les écuyers au temps des Templiers etc.… mais ne soyez jamais curieux de manière malsaine. Je veux dire par là que si vous êtes amenés à voir certaines choses ou actions, ou si des adultes discutent entre eux, écoutez mais ne vous mêlez pas de la conversation ; ne posez pas de questions. Si l'on juge que vous devez en être informés, nous vous dirons de quoi il s'agit. Sinon, il ne faut pas vous vexer car rien ne sera dit… et ne cherchez pas à savoir ou il vous en cuira. La seule réaction valable est d'agir comme si vous n'aviez rien vu, rien entendu. Alors les gens de mauvaise curiosité (et il y en a parmi nous) ne doivent pas poser de question. Ils ne doivent répondre et participer que lorsqu'ils sont concernés ou interrogés. Je tiens à vous dire également que vous aurez à participer à certaines choses qui ne regardent que l'Échelon ou même vous personnellement. Soyez discrets. Même si cela vous surprend, vous choque au premier abord, c’est pour votre bien. Vous comprendrez plus tard… et n'allez pas raconter tout, que ce soit à vos parents, à vos frères ou sœurs, ou à vos amis.
Votre seule vraie famille, c'est l'Observance.
Apprenez à être discret : une des premières qualités du Chevalier. Apprenez à garder certaines choses pour vous. Je vous préviens, il y aura au cours de vos différents séjours à B ** des pièges qui vous seront tendus. Pourquoi ? Et bien pour savoir :
* Si vous êtes unis.
* Si vous vivez en fraternité.
* Si vous êtes discrets.
* Si vous êtes honnêtes.
* Si vous êtes loyaux.
En un mot, pour savoir si vous êtes dignes d'êtres des Pages ou des Écuyers de l'O.M.C.
Rappel historique.
Ce qui suit intéresse surtout les nouveaux mais les anciens doivent également écouter.
Pourquoi commencer cette réunion par un rappel historique ? C'est uniquement pour que vous puissiez mieux comprendre le cadre dans lequel nous allons évoluer et pour mieux en définir les buts.
Notre groupe ou Échelon (nous verrons tout à l'heure ce qu'est un Échelon) fait partie d'un ensemble d'Échelons situé un peu partout en France : En Lorraine, en Bourgogne, en Anjou, dans les Landes et chez vous, en Picardie. Tous font partie de l'O.M.C. c'est le sigle de notre mouvement. Cela veut dire en latin : Observantia Militum Christe ; traduit dans notre langue on nous appelle les Chevaliers Militaires du Christ.
L'O.M.C. fait partie des ordres chevaleresques religieux.
Comment ce mouvement est-il venu jusque chez vous ?
Alain qui avait des responsabilités dans le scoutisme en France a entendu parler pour la première fois de l'Observance en 197* par un de ses amis, chef scout en Belgique. Après avoir longuement réfléchi et posé toutes les questions sur cette organisation et sur les buts de ce mouvement, il s'est rendu compte que l'on pratiquait dans ce mouvement un idéal de vie au-delà des espérances que le meilleur des scoutismes saurait proposer. Il prit contact en 197* avec la Commanderie de Bourgogne pour saisir de visu ce que l'on y faisait. Il revint encore plusieurs fois à B ** et en 197* il officialisa son entrée chez nous.
Après avoir bien fait connaissance avec les règles et les buts de l'O.M.C. ainsi que des personnes qui en font partie, il décida en 197* de créer un Échelon expérimental avec des garçons qui n'avaient pas l'habitude de vivre en groupe (la plus part des autres Échelons ont des jeunes issus du scoutisme). Le premier garçon recruté était Bernard J… en octobre 197*, suivi de Frédéric B… début 197*. En juin 197*, Bernard fit un camp de formation d'une dizaine de jours à B **. En septembre 197*, c'était au tour de Frédéric et de Lionel à venir grossir les rangs. Puis, au début de cette année 197*, c'est Eric B… qui rentra dans le groupe et Thierry Z… suivi des trois frères P… Ainsi l'Échelon de D ** prenait corps.
Le 11 mai 197*, sous la haute autorité du moine chevalier Yvon Ray, précepteur de la Commanderie de B ** -les-Templiers, avec l'accord du Chapitre, est érigé en la citadelle de D ** un Échelon de Pages et d'Écuyers de France, placé sous l'autorité d'Alain Lemire, chevalier hospitalier, qui fut intronisé à l'occasion, Gouverneur de D **.
Afin de vous familiariser avec certains mots et pour que vous puissiez connaître la hiérarchie dans l'Observance, nous allons voir les structures de notre mouvement.
À la base se trouvent les Pages jusqu'à 13 - 14 ans. Ils sont formés par leurs Écuyers responsables d'eux. Il y a deux sortes d'Écuyers : les “Hors Pages” (14 à 16 ans) et les “Accomplis” (17 à 19 ans). Un Écuyer et un Page forment ce que nous appelons un Équipage.
Au dessus de l'Écuyer accompli, se trouve le prétendant en chevalerie (20 à 23 ans). Ensuite, en montant toujours vers le haut nous trouvons les Chevaliers, les Accomplis, puis les Chevaliers Gouverneurs, et encore au dessus il y a les Précepteurs. À leur égal, sont les Chapelains (généralement des pères ermites bénédictins). Bien d'autres rangs existent encore pour arriver tout en haut de cette pyramide qu'est notre hiérarchie, où se trouve le Grand Maître. Votre constance et votre sagesse vous permettront peut-être un jour de le rencontrer.
Maintenant, voyons l'organisation : nous avons vu ce qu'est un Équipage. 7 ou 8 Équipages maximum forment un Échelon sous l'autorité d'un chef d'Échelon élu par les Écuyers. 4 Échelons forment une Échelle, avec son chef désigné parmi les chefs d'Échelon, par le Gouverneur.
Chefs d'Échelon et chef d'Échelle sont sous l'autorité d'un Chevalier pour les premiers, et d'un Gouverneur pour le deuxième. (Une Échelle rassemble environ 60 garçons).
4 Échelles forment une Lance. Cette dernière est toujours commandée par un Chevalier sous l'autorité d'un Gouverneur. Elle comprend généralement plus de 200 garçons.
Nous venons donc de voir comment est structurée l'Observance. Les mêmes règles sont employées à l'étranger.
Les nouveaux, maintenant ceci vous intéresse au premier plan. Sachez que si vous êtes acceptés comme Page ou comme Écuyer, vous aurez également à choisir la couleur de vos barrettes. Il existe trois couleurs représentant trois spécialités différentes par leur appellation, mais surtout par leur compétence :
* Rouge : pour l'intervention.
Qu'elle soit civile ou militaire, en France ou à l'étranger.
* Bleue : pour les guides de Route.
Les missions de reconnaissance et de renseignement.
* Verte : pour les guides d'accueil.
Les missions de protection et de services en campagne, pour héberger et nourrir nos hommes.
Cependant, avant d'en arriver là, il vous faudra passer des épreuves afin que le Chef d'Échelon et le Gouverneur puissent savoir si vous êtes capables et dignes de faire parti des Pages ou des Écuyers. N'essayez pas de savoir auprès des anciens à quoi correspondent ces épreuves : ils commettraient une grande faute s'ils transgressaient notre loi du silence — ou de discrétion si vous préférez. Nous vous l'avons déjà dit et là, je m'adresse à tous. Nous vous le répétons car c'est important. Toutes nos activités — et non pas seulement pour les épreuves — ne doivent pas êtres connues de personnes étrangères à l'Échelon ; non pas parce que nous avons quelque chose à cacher (nous n'avons rien à cacher) mais ce silence est simplement souhaité pour vous apprendre à être discret. Quelqu'un de discret est toujours efficace par contre un homme qui parle trop est souvent dangereux et par conséquent nous ne pouvons pas lui faire confiance : donc il n'a pas sa place chez nous puisque tout est basé sur la confiance.
Autre chose, soyez curieux par exemple du passé de votre Commanderie, curieux de savoir comment vivaient les pages et les écuyers au temps des Templiers etc.… mais ne soyez jamais curieux de manière malsaine. Je veux dire par là que si vous êtes amenés à voir certaines choses ou actions, ou si des adultes discutent entre eux, écoutez mais ne vous mêlez pas de la conversation ; ne posez pas de questions. Si l'on juge que vous devez en être informés, nous vous dirons de quoi il s'agit. Sinon, il ne faut pas vous vexer car rien ne sera dit… et ne cherchez pas à savoir ou il vous en cuira. La seule réaction valable est d'agir comme si vous n'aviez rien vu, rien entendu. Alors les gens de mauvaise curiosité (et il y en a parmi nous) ne doivent pas poser de question. Ils ne doivent répondre et participer que lorsqu'ils sont concernés ou interrogés. Je tiens à vous dire également que vous aurez à participer à certaines choses qui ne regardent que l'Échelon ou même vous personnellement. Soyez discrets. Même si cela vous surprend, vous choque au premier abord, c’est pour votre bien. Vous comprendrez plus tard… et n'allez pas raconter tout, que ce soit à vos parents, à vos frères ou sœurs, ou à vos amis.
Votre seule vraie famille, c'est l'Observance.
Apprenez à être discret : une des premières qualités du Chevalier. Apprenez à garder certaines choses pour vous. Je vous préviens, il y aura au cours de vos différents séjours à B ** des pièges qui vous seront tendus. Pourquoi ? Et bien pour savoir :
* Si vous êtes unis.
* Si vous vivez en fraternité.
* Si vous êtes discrets.
* Si vous êtes honnêtes.
* Si vous êtes loyaux.
En un mot, pour savoir si vous êtes dignes d'êtres des Pages ou des Écuyers de l'O.M.C.
* * *
À l'inverse des parents, je suis davantage impressionné et admiratif, plutôt qu'affolé par ce texte… que je réussis à ranger pour mes archives.
Nous n'aurons plus aucune nouvelle de madame Lemire.
Je continue à rêver d'une Observance qui serait saine, où il ferait bon vivre… Mon père, lui, reprend la plume afin de tenir au courant le sénateur-maire, des activités particulières de Lemire avec des mineurs en sa commune. Il lui joint quelques photocopies des pièces possédées.
L'abbé d'A**, aumônier de la Base Aérienne, est aussi convié à la maison…
Les parents tentent de mettre fin au plus vite à tous ces agissements… et je les laisse se démener sans les encourager.
Cela semble bien long à se décanter.
Janvier s'achève et toujours rien à l'horizon. Les parents s'inquiètent et rendent visite au lieutenant de gendarmerie qui ne cherche plus à se déplacer… Il essuie avec sang-froid la colère de ma mère : le dossier est parti au département puis à la région… depuis, ils n'ont reçu aucun ordre pour agir davantage.
Comme tout cela paraît être bien connu de l'Armée de l'Air, afin de lutter plus rapidement contre l'O.M.C., maman joint par téléphone un de ses cousins, général de division aérienne — en réserve depuis peu — et lui explique la situation…
Quinze jours passent, puis trois semaines… Avant que le mois de février ne soit achevé, maman tente de le joindre de nouveau. L'assurance a changé :
Cela ne vaut rien de bon d’en parler davantage.
Je ne puis plus rien pour vous.
Comme votre fils Philippe ne semble pas avoir été impliqué dans quelques affaires glauques de l'Observance, tâchez d'oublier ; c'est préférable…
Le sénateur maire nous écrit lui aussi, sans donner de solution, sur un petit carton de visite, en nous retournant le dossier :
Nous n'aurons plus aucune nouvelle de madame Lemire.
Je continue à rêver d'une Observance qui serait saine, où il ferait bon vivre… Mon père, lui, reprend la plume afin de tenir au courant le sénateur-maire, des activités particulières de Lemire avec des mineurs en sa commune. Il lui joint quelques photocopies des pièces possédées.
L'abbé d'A**, aumônier de la Base Aérienne, est aussi convié à la maison…
Les parents tentent de mettre fin au plus vite à tous ces agissements… et je les laisse se démener sans les encourager.
Cela semble bien long à se décanter.
Janvier s'achève et toujours rien à l'horizon. Les parents s'inquiètent et rendent visite au lieutenant de gendarmerie qui ne cherche plus à se déplacer… Il essuie avec sang-froid la colère de ma mère : le dossier est parti au département puis à la région… depuis, ils n'ont reçu aucun ordre pour agir davantage.
Comme tout cela paraît être bien connu de l'Armée de l'Air, afin de lutter plus rapidement contre l'O.M.C., maman joint par téléphone un de ses cousins, général de division aérienne — en réserve depuis peu — et lui explique la situation…
- — Ma chère Jeanne, dans huit jours l'affaire sera réglée, je vous en donne ma parole !
Quinze jours passent, puis trois semaines… Avant que le mois de février ne soit achevé, maman tente de le joindre de nouveau. L'assurance a changé :
- — Mon Dieu, Jeanne, ne me parlez plus de cette affaire. Je ne sais pas vraiment où vous vous êtes embarqués…
Cela ne vaut rien de bon d’en parler davantage.
Je ne puis plus rien pour vous.
Comme votre fils Philippe ne semble pas avoir été impliqué dans quelques affaires glauques de l'Observance, tâchez d'oublier ; c'est préférable…
Le sénateur maire nous écrit lui aussi, sans donner de solution, sur un petit carton de visite, en nous retournant le dossier :
Le sénat
Le 28 février 198*
Monsieur le sénateur maire Jean M **
Vous adresse en retour les documents que vous lui aviez confiés.
Il ne manquera pas de vous tenir informé de ses démarches à ce sujet.
Dévoués sentiments.
Le 28 février 198*
Monsieur le sénateur maire Jean M **
Vous adresse en retour les documents que vous lui aviez confiés.
Il ne manquera pas de vous tenir informé de ses démarches à ce sujet.
Dévoués sentiments.
Ce Monsieur aux grandes responsabilités, cherche à éviter mon père lors de diverses réunions sociales ou politiques… toujours très pressé certainement.
La mutation soudaine du Colonel de la Base Aérienne, est une preuve de plus du silence imposé sur l'affaire.
La gendarmerie de D** change de personnel… des mutations, toujours !
Mon petit lieutenant est parti pour une autre gendarmerie…
Enfin, Alain Lemire est muté sur une autre Base… avec les galons tous neufs d’adjudant.
La ville de D** n'est plus recevable pour tout problème causé par les activités extra-professionnelles de ce monsieur, explique le nouveau lieutenant de gendarmerie.
Nous apprenons mi-mars, que l'affaire est classée.
La mutation soudaine du Colonel de la Base Aérienne, est une preuve de plus du silence imposé sur l'affaire.
La gendarmerie de D** change de personnel… des mutations, toujours !
Mon petit lieutenant est parti pour une autre gendarmerie…
Enfin, Alain Lemire est muté sur une autre Base… avec les galons tous neufs d’adjudant.
La ville de D** n'est plus recevable pour tout problème causé par les activités extra-professionnelles de ce monsieur, explique le nouveau lieutenant de gendarmerie.
Nous apprenons mi-mars, que l'affaire est classée.
Vers le
Chapitre XX
Chapitre XX
®© Du silence au mensonge,
Des écrits de Yves Philippe de FRANCQUEVILLE
Pirate des mots et philanalyste en herbe.
Tous droits réservés.
Des écrits de Yves Philippe de FRANCQUEVILLE
Pirate des mots et philanalyste en herbe.
Tous droits réservés.
Auteur : Yves Philippe de Francqueville
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